Jailynn & Maeva || Papaoutai

T’as faim, Jailynn. Tu es même plutôt affamée, pour être exacte. Ton dernier repas consistant remonte à si longtemps que tu ne t’en remémores que très peu. Enfin, tu exagères sans doute. Pourtant, cette sensation ne quitte plus ton estomac vide et tu en deviens agacée. Sur les nerfs. Evidemment, manger rimerait avec grapiller de l’argent sur tes maigres économies, celles que tu dissimules soigneusement aux yeux de Tony, en les camouflant dans une poche discrète de l’un de tes vieux vêtements, laissé traîner dans ton armoire où trônent des tenues plus « excitantes ». Ainsi, mis à la vue de Tony sans qu’il ne soit extravagant, il n’avait l’air de « rien » mais il camouflait tes rares espèces. Tu les conservais précieusement pour espérer, un jour, pouvoir t’extirper de ce milieu merdique dans lequel tu étais quasiment née. Et si tu te disais que cela ne serve désormais plus à rien de te préoccuper de tes rêves, morts les uns après les autres, tu gardais tout de même une petite flamme d’espoir quant à ton avenir incertain. Après tout, il ne te restait que cela pour te nourrir d’autre chose que des coups ressentis sur ton corps et les maux de ton âme. C’est ainsi que, quelques sous dans les poches, tu déambulais dans la rue à proximité de ton domicile, à la recherche d’un savoureux déjeuner. Tu jetas ton dévolu sur un hamburger et des frites, agrémentés d’un Coca-Cola, que tu dégustas longuement sur un banc, à la vue des passants, tandis que tes vêtements habillés ne laissaient pas transparaître à quelles activités tu t’adonnais une fois la nuit tombée, lorsque Tony te le demandait. Et, tandis que tu arrivais gentiment à la fin de ton repas, tu remarquas une silhouette latine que tu reconnaissais aisément. Aussitôt, tu te redressas sur tes longues jambes parsemées de bleues, évidemment dissimulés par ton jean, et tu fis signe à la demoiselle. « Eh, Mae! » lanças-tu en agitant tes bras, pour que son regard vienne trouver le tien. Dès que son visage t’apparut, tu sus que c’était bien elle. Tu reconnaîtrais la chevelure ébène de la jeune femme ainsi que ses yeux entre milliers d’autres. Votre amitié, qui datait désormais, n’était plus à revendiquer. Tu t’avanças alors vers elle, découvrant ses traits marqués par l’agacement – et potentiellement la fatigue. Aussitôt, tes sourcils se froncèrent d’étonnement et d’interrogations. « Ca ne va pas? » demandas-tu sans détour, puisque l’honnêteté était une de tes rares qualités – ou un de tes plus grands défauts. Tu t’inquiètes automatiquement de la savoir dans cet état. Evidemment, tu l’avais déjà aperçue dans des situations difficiles et inversement. Après tout, vos « exploits » n’étaient pas sans risque. Sauf que, cette fois-ci, tu ressentais qu’il s’agissait d’autre chose.

@Maeva Espinosa