Dessine-moi un mouton | ft. Milan ♥

[ FLASHBACK ]

Je me baladais les rayons de livres pour enfant. Je voyais mes clientes et clients et donc pouvais voir vers quoi ils se dirigeaient. Qu’est-ce qui attirait leur regard ? Une couverture de livre flashy ? Des histoires avec des petits chats en personnages ? La texture du papier ? La taille de la police d’écriture ? La qualité de l’impression ? L’histoire palpitante ou bien encore les dessins ? Toutes ces questions, je me les posais à chaque fois que je réfléchissais au prochain livre. Avant, je me serais contenter de ne penser qu’aux dessins, maintenant, c’était la globalité de ces interrogations. Voir ce que proposait la concurrence – et encore je ne sais pas si je peux vraiment parler de concurrence, ce ne sont que des livres pour enfants et chaque histoire est différentes – mais il était toujours important d’être à la page et savoir ce qui se produisait à côté. Mon regard avait été attiré par un livre aux dessins magnifiques. C’était toujours ce qui m’accrochait. Les dessins. Il faut dire que c’était comme ça que j’avais commencé et c’était ce que je préférais toujours faire dans mon métier. Il fallait que j’en sache plus sur cet ouvrage.

Un coup de fil à une bonne connaissance dans le milieu de la littérature enfantine était nécessaire. Je donnais les informations sur le livre, le titre, l’auteur, la maison d’édition, mais surtout le nom de l’illustrateur. Milan Hill. Si je l’appelais, c’était parce qu’on pourrait penser qu’elle connaissait quasiment tout le monde dans le milieu. A chaque fois que tu parles d’un tel c’est « ah oui, j’ai déjeuner avec lui et sa femme la semaine dernière » ou encore « son fils va se marier avec ma nièce cet été » comme si le monde était minuscule pour elle. Du coup, je tentais ma chance afin qu’elle me trouve le numéro de téléphone de Milan Hill, ou bien un autre moyen de le contacter.



C’était le jour J de ma rencontre avec Milan Hill. J’avais pu le contacter grâce à la connaissance que j’avais appelé il y a de ça un peu plus d’un mois. Il avait fallu un peu de temps pour qu’on puisse se caler un rendez-vous afin de se rencontrer. Même si nos travails nous permettaient de travailler chez nous, ce n’est pas pour autant qu’on avait pas de travail à faire durant un mois. Personnellement, je venais de finir l’illustration d’un nouveau livre. Non, pas le mien. Mais je pensais déjà à une nouvelle histoire, plutôt rocambolesque, si je puis me permettre, et c’est là que j’ai eu l’idée. J’avais été séduite par le talent de dessinateur de Mila, et quand j’ai pensé à l’histoire que je voulais faire, j’ai vu son coup de crayon dans le livre. Ça ne s’explique pas, c’était ainsi. C’est pourquoi j’envisageais avec ce rendez-vous, tout d’abord d’en apprendre plus sur lui, ses débuts, ses projets, ses envies ; mais également s’il serait partant pour une collaboration avec moi sur mon prochain livre. Bien sûr, si le feeling passe bien entre nous. Je ne me forcerais jamais de travailler avec des personnes où ça se passe mal. C’est d’ailleurs pourquoi je faisais confiance à ma meilleure amie Charlène pour éditer mes livres depuis dix ans. Ça restait dans la famille, si on puit dire.

Je lui avais donné rendez-vous au restaurant à midi trente précisément. J’aimais traiter autour d’un bon repas. Puis ça me permettait aussi de juger ses goûts en matière de gastronomie. On en apprenait beaucoup sur la personne en regardant son assiette, à mon humble avis. J’arrivais en regardant ma montre, de peur d’être en retard. J’étais dans les temps. Extraordinaire. J’avais pour habitude d’avoir toujours quelques minutes de retard. Une star sait se faire attendre, comme on dit. « J’ai réservé une table au nom de Fischer. » annonçais-je au type derrière son comptoir. On m’avait bien dit qu’il était inutile de réserver pour cette date quand je les ai eus au téléphone, mais j’avais insisté parce que j’adore dire que j’ai une réservation à mon nom. Ne me demandez pas pourquoi. « Par ici, s’il vous plait. » me disait le mignonnet petit placeur, d’un geste de la main.