(Isabel) Do Ré Mi

Je ne suis pas trop du genre à sortir pour faire de nouvelle rencontre simplement parce que je passe mon temps au travail à vouloir faire le bien autour de moi où chez moi… Alors les sorties dans un bar ça ne me ressemble pas , mais je me suis laissé convaincre par une collègue à moi de laisser une chance à son frère. Les rendez-vous arranger ce n’est pas non plus ma tasse de thé d’autant plus que mon cœur appartient à un autre homme, mais je ne perds pas l’objectif à mes yeux qui est de convaincre cet homme d’organiser une collecte une animation pour les enfants de l’hôpital, le frère de ma collègue travail à la mairie et je vois donc en lui non pas un amour futur, mais bien d’autres avantages.

Je n’ai pas cherché à me mettre en mode séduisante pour attiré son regard, je suis vêtue simplement comme toute femme serait vêtue pour un rendez-vous d’affaires simple d’une certaine manière, un café devant moi j’attends depuis un petit moment maintenant qu’il daigne se pointé et j’avoue que le sentiment qu’il ne viendra pas commence légèrement à se faire ressentir.
Je tapote doucement mes doigts sur la tasse en parcourant un manuel de médecine quand j’entends la porte du petit bar s’ouvrir directement mon regard se pose sur la personne qui vient d’entrée et je soupire en découvrant une femme.
Une bonne demi-heure plus tard, il est maintenant une évidence que cet homme ne viendra pas d’autant plus que je n’ai pas de ses nouvelles, je soupire et je ferme mon manuel de médecin pour le remettre dans mon sac sacoche et je porte ma tasse à mes lèvres pour boire le restant de mon café maintenant froid, puis une fois celui-ci terminé je pose ma tasse et je me lève avec l’intention de quitter les lieux quand la mélodie du piano dans le fond se fait entendre. Je tourne la tête pour découvrir une demoiselle fascinante, je m’approche doucement tout en écoutant le talent inouï dont elle fait preuve. Maintenant proche d’elle, je me laisse emporter intérieurement par les émotions qu’elle dégage en jouant cette musique d’une douceur extrême.

Quand la musique prend fin, je souris et je me sens subitement plus légère et sa remarque sur le fait est qu’elle me laisse la place me fait écarquiller les yeux << Oh la, non, je vous en prie, continuer >> dis-je en souriant délicatement à la demoiselle regardant les touches de l’instrument que je n’ai pas eu le plaisir de toucher, parcourir, caresser depuis des années maintenant. Je finis par me racler doucement la gorge m’approchant laissant doucement le bout de mes doigts caresser délicatement les touches sans les enfoncés et sans m’en rendre compte je me retrouve assise que le banc de piano, je pince mes lèvres et je finis par dire à la demoiselle << ça fait des années que je n’ai pas touché un piano, je pense être rouillée >> dis-je en appuyant sur une touche pour commencer une mélodie << Voyons voir, si c’est comme le vélo >> n'ayant finalement rien à perdre et n’était pas du tout le genre de femme qui craint le ridicule, je laisse mes doigts parcourir les touches pour laisser échapper une mélodie que je jouais sans fin étant plus jeune. Cette mélodie Forrest Gump - Feather Thème me permettait autrefois de m’échapper de ma prison de pierre, elle me laissait croire et l'espoir qu'un monde meilleur allait s'ouvrir à moi et c'est tout ce dont j'avais besoin.

Mes doigts retrouvent instinctivement les accords des touches et les vibrations des cordes me parcourent comme à cette époque qui me semble aujourd’hui avoir existé dans une autre vie. J’inspire me délectant du bien être que je ressens, que je bois à chaque note que je libère et mes paupières se ferment laissant totalement mes souvenirs, mon âme parcourir le clavier.
Le piano a toujours bercé ma vie d’aussi loin que je m’en souvienne et sans obstacle j’en aurais peut être fait mon métier puisque j’étais douée et que beaucoup m’ont signalé, il y a longtemps que cela coulait dans mes veines… Aujourd’hui cette vie n’est plus la mienne, mais pourtant le piano semble toujours me posséder, il semblerait que nous soyons toujours à l'unisson. Un sourire s’affiche sur mon visage qui rayonne d’un éclat porté disparu depuis, si longtemps, mes paupières s'ouvrent et je dévore sans limites les touches jusqu’à rendre le dernier souffle de la mélodie. Les mains encore tremblantes sur le clavier, mon cœur bat à la chamade tandis que les résonances de la mélodie éclatent encore sur les coins des murs du bar, je tourne la tête vers la demoiselle qui m’a clairement donné l’envie d’essayer << C’est comme le vélo >>.

Je ne peux qu’être d’accord avec la demoiselle que je ne connais pas et que je n’ai jamais eu le plaisir de croiser quand elle me signale que la musique se partage. Instinctivement mes doigts parcourent le clavier comme si, elles ne l’avaient jamais quitté et mon âme vibre sous la fréquence délicieuse que chaque note laisse s’évaporer dans l’air du temps. Le temps de ses deux minutes quarante-cinq secondes, j’ai l’impression que le monde autour de moi s’est figé et que je me retrouve seule. Cette sensation, je ne l’ai plus ressentie depuis le soir où j’ai eu le plaisir et la joie de caresser le clavier des bouts des doigts. Après ce moment intense pour moi, mes doigts restent sur le clavier et un sourire de bien-être illumine mon visage qui aurait pu croire, pensée qu’un simple instrument pourrait me faire sentir aussi complète. La question de la femme qui est toujours une parfaite inconnue me fait tournée la tête << Oui quand j’étais bien plus jeune >> je souris à celle-ci la regardant toucher les touches, elle semble réellement sous le charme de la musique. J’écoute la musique tous les jours pourtant, je ne m’étais pas rendu compte avant aujourd’hui à quel point en jouer me manquait sa nouvelle question me fait sourire avec tendresse << Oh, non je vous en prie >> dis-je voulant l’écouter à nouveau et puis, je ne suis pas là pour l’empêcher de jouer en monopolisant le piano quoique j’aimerais bien… Je me racle la gorge en me décalant du banc à piano avec l’intention de lui laisser la place, mais le petit regard rempli de bienveillance qu’elle a sur ma personne me pousse à m'installer davantage pour jouer une nouvelle mélodie. Je passe ma langue sur le bout de mes lèvres tandis que je me laisse songer à quelle musique je pourrais jouer sans me tromper puisque cela fait tout de même des années maintenant que je n’ai pas joué.

Alors qu’elle se présente, je pose une nouvelle fois mon regard sur elle en lui souriant << C’est un plaisir Riley, moi c’est Isabel, mais vous pouvez m’appeler Isa >> dis-je n’appréciant pas forcément la contenance de mon prénom. Je passe une main dans mes cheveux << La musique est votre métier ? >> moi qui d’ordinaire ne m’intéresse pas tant aux personnes que je ne connais pas, je me retrouve piquée par la curiosité que cette femme me procure. Elle me semble avoir un aura ouvert sur l’art et la musique est à mon sens l’un des plus beaux arts qu’il puisse exister et elle joue si bien que je n’en serais pas surprise. Doucement, je laisse glisser mes doigts pour jouer l’air connu de John Lennon- Imagine puis après ce moment, je me redresse en disant << À votre tour >>. Moi qui voulais quitter les lieux, je me retrouve envoûtée par la cadence, le rythme d’une mélodie qui me berçait il y a fort longtemps “La musique”.

C’est étrange dans un sens d’être derrière ce piano et de caresser ses touches comme si jamais mes doigts ne les avaient quittés alors que je le sais bien avec certitude même que cela fait des années que je n’ai pas eu le plaisir de jouer pourquoi ? À dire vrai, je pense que j’étais persuadée ne plus savoir et pourtant, ce moment prouve le contraire puisqu’il est évident que j’excelle et que mes souvenirs sont parfaits. Il faut dire que plus jeune le piano était pour moi un moyen de m'extérioriser d’être celle que je voulais être s’était un peu l’objet qui me servait à fuir la réalité dans laquelle je vivais difficilement… Aujourd’hui, je sais que je dois mon courage à jouer après toutes ces années à la demoiselle autrement jamais de moi-même je me serais permise, jamais je n’aurais eu le cran d’essayer bien trop tenu par la peur d’échouer. Je me surprends même à faire la discussion pourtant, ce n’est pas mon genre, mais ces derniers temps tout me semble plus facile et moins lourd à porter peut-être que mes séances chez le psy portent finalement leurs fruits… Ou est-ce les battements de mon cœur à l’égard de Soren qui me rend aussi joviale et ouverte d’esprit ? J’avoue n’avoir aucune idée du pourquoi, mais je sais simplement que cela me fait du bien. Prête à faire la causette, je souris à la demoiselle quand elle me répond que son métier n’est pas loin et je comprends mieux quand elle m’explique << Je vois ! Vous exposez vos œuvres ? >> je ne connais malheureusement pas grand-chose à l’art du dessin et de la compagnie. Je me décide à jouer une nouvelle musique et à la fin de celle-ci j’entends sa petite remarque qui me fait sourire, je hoche la tête << Vous aviez raison et ça me fait un bien fou ! >> dis-je en avouant alors le bien fait que jouer quelques minutes vient de m’apporter. Je lui cède ma place me doutant qu’elle a encore envie de jouer puisque moi aussi je ressens cette envie, cette envie qui m’avait quitté ses dernières années, cette envie que je ne pensais pas retrouver. La musique s’arrête et je suis limite bouche bée par l’émotion qu’elle a su faire vivre dans chaque note, mais sa question me surprend un peu plus. Je cligne deux fois des yeux et je finis par me dire que cela ne peut pas me faire de mal << Avec plaisir Riley, un café crème sera parfait pour ma part >> je souris en regardant autour de nous remarquant que personne ne nous porte attention et cela me convient parfaitement !

 

Il est naturel que ma curiosité se fasse active quand j’apprends que la demoiselle tient une galerie d’art, c’est donc naturellement que je lui ai demandé, si elle exposait ses œuvres sa réponse est directe détail qui me fait sourire, je comprends bien ce qu’elle veut dire, mais je me permets d’ajouter << Eh bien, si vous faites des œuvres aussi belles que ce que vous jouer dans ce cas, je vous conseils de mettre vos œuvres en avant >>. Je sais déjà que je vais me rendre dans cette galerie parce que je suis curieuse et bien que cela est un défaut, il s’avère parfois que c’est une bonne chose d’être curieuse autrement je ne pourrais pas évoluer dans mon métier.


Rapidement, nous nous retrouvons autour d’une table et le serveur arrive avec mon café et la bière de la demoiselle qui vient ensuite me demander si nous pouvons nous tutoyer ma réponse est totalement positive puisqu’elle ne semble pas être beaucoup plus jeune que moi et puis il est plus appréciable de se tutoyer.
J’ouvre légèrement le sachet de sucre et je le verse dans mon café crème, je tourne la cuillère dans celui-ci quand elle me demande ce que je fais dans la vie, je souris << Je suis résidente pour devenir Chirurgienne pédiatrique >> j’aime énormément ce que je fais puisque cela m’aide à sauver des vies et qui plus est des vies innocentes de toute cruauté.

Je retire la cuillère de ma tasse et je l’essuie avec ma bouche pour venir la poser ensuite sur la table sentant toujours en moi cette pulsion de joie, de plaisir et de satisfaction… Comme si avoir joué à nouveau venait réveiller une partie de moi qui était jusqu’ici profondément endormie << Tu viens souvent ? >> Après tout, elle était tellement à l’aise que l’idée qu’elle soit une cliente régulière parcourt mon esprit. Les notes du piano se fond à nouveau entendre, je tourne la tête et je n’ai pas le temps de dire quoi que ce soit que la voix de ma nouvelle “Amie” se fait entendre << Effectivement ! On dirait bien que tu as réveillé tous les artistes présents >> la mélodie est réellement agréable à entendre et le sourire sur le visage de la demoiselle exprime parfaitement ses émotions choses que je trouve plaisantes << La mélodie est magnifique, je sais que je l’ai déjà entendu, mais je ne sais plus le titre ça te parle toi ? >> je soulève doucement ma tasse l’approchant de mes lèvres et je prends le temps de souffler doucement sur le liquide qui fume encore.