Glad you're alive | Zach

La veille au soir, Gaïa s'était tapé l'incruste dans une soirée étudiante. C'était tellement facile à faire, il suffisait d'un rouge à lèvres et d'un décolleté, plus facile que de chiper une sucette à un bébé. La dernière fois qu'elle avait participé à une fête, ça ne s'était pas franchement bien terminé. Il y avait eu des blessés plus ou moins graves mais pas de morts à sa connaissance. Au moins, même s'il y avait de l'alcool et des substances pas très légales, la fête en question l'était, il n'y avait pas d'orage pour faire tomber des arbres ou de voitures pour foncer dans les murs. En fait, à moins d'y laisser sa peau, ça ne pouvait que mieux se terminer. Et cette fois-ci, avant que ça ne parte en couille, elle s'était empressée de taper dans le buffet. Pas deux catastrophes, non mais ! La fête s'était bien passée - enfin sauf pour ceux qui s'étaient retrouvé à dégobiller leur alcool dans la rue -  elle avait bouffer comme une vache, avait picolé et avait fini la nuit avec un étudiant qui avait son petit studio sur le campus. Au matin, elle en avait profité pour prendre une douche pendant qu'il dormait encore malgré la sonnerie de son réveil. Ça sentait le retard en cours ça, mais ce n'était pas le problème de la brunette qui avait chourré de la bouffe dans ses placards avant de sortir discrètement.

Plongée dans le noir, le soleil lui agressa les yeux quand elle mit les pieds dehors. Il ne faisait pas bien chaud mais le temps était ensoleillé. Un rapide coup d'œil à son téléphone lui apprit qu'il était environ dix heures, probablement entre deux créneaux de cours car le campus ne grouillait pas comme une fourmilière. Gaïa n'avait jamais été très branchées études, le lycée ça avait déjà été compliqué, mais elle aimait l'ambiance de l'université. Enfin... surtout la partie vie étudiante, les cours beaucoup moins. Alors qu'elle flânait mains dans les poches sur le campus, un visage attira son attention. Elle regarda au loin avec un peu plus d'insistance, pas certaine de qui elle voyait. Mais si, c'était bien lui. Zach. Il venait régulièrement au gymnase où elle allait taper dans des sacs mais ça faisait une paye qu'elle ne l'y avait pas vu. Elle pressa un peu le pas pour se rapprocher et une fois à sa hauteur lui adressa un sourire.

Bah alors beau gosse, on a arrêté le sport ? J'commençais à croire que t'étais mort

Gaïa n'avait pas mis les pieds aux gymnase depuis quelques temps maintenant. Depuis la fête qui était partie en vrille en fait. Mais elle s'en sortait bien, elle n'avait finalement eu que quelques plaies et des points de suture, elle avait subit bien pire dans certain de ses combats. Mais Zach ça faisait des mois et des mois qu'elle ne l'y avait pas vu. Pendant un temps, elle s'était demandé s'il n'avait juste pas le temps ou s'il avait carrément déménagé de Washington. De toute façon, c'était toujours au moment où on ne  ça la faisait plus sourire qu'autre chose, surtout à l'idée de se demander ce qui se passait dans la tête de l'étudiant en entendant quelqu'un appeler son prof "beau gosse" comme si de rien n'était. « Visiblement tu n’as toujours pas changé Gaïa.» Pourquoi elle ferait ça ? Elle était parfaite ! « Et non, je n’ai pas arrêté le sport d’un seul coup, j’ai eu un accident qui a fait que j’ai dû arrêter. Et toi, je peux savoir ce que tu fais sur un campus universitaire ? Sauf si tu as pris la décision de commencer des études d’un seul coup ? » Un accident ? Ça expliquait pas mal de choses. Enfin maintenant il avait l'air de se porter comme un charme.

J'vois deux bras et deux jambes dit-elle en le regardant de haut en bas Va falloir t'y remettre avant de perdre les bonnes habitudes Bon c'était surtout qu'elle aimait bien le regarder s'entrainer mais chut Nan moi j'me contente de me taper tes étudiants, cela dit, si mes profs avaient eu le même cul que toi, j'aurai probablement été plus attentive en classe elle esquissa un sourire Mais rester le cul visser dans une chaise à écouter un glandu parler pendant deux heures, c'est vraiment pas mon trip, lo siento

Déjà au lycée, elle n'aimait pas vraiment le cours. Son diplôme, elle l'avait eu mais de justesse. Puis pour ce qu'il lui servait maintenant, elle se demandait bien pourquoi elle s'était emmerdée à aller jusqu'au bout. Quant aux études, même si elle avait été un peu plus scolaire, il n'y avait aucun domaine qui lui tenait suffisamment à cœur pour poursuivre des études là-dedans.

Intellectuellement, Gaïa n'était pas plus conne que la moyenne, elle aurait été capable de suivre à la fac. Mais ça n'avait jamais été son truc, le système scolaire n'était pas fait pour elle. Mais sans doute était-ce du au fait d'avoir toujours ressenti une sorte d'injustice au fond d'elle qui en avait fait une fille sauvage, rebelle, jamais d'accord avec la majorité. Quitte à sortir du lot, autant que ce soit de sa propre volonté. D'aussi loin qu'elle se souvienne, cet esprit de contradiction avant toujours été ancré en elle et ce n'était pas facile de la faire changer d'avis, encore moins de lui faire admettre ça. "Y'a que les cons qui changent pas d'avis" ? Bah très bien, elle assumait d'être con dans ce cas. C'est sans doute pour ça qu'elle n'était pas vraiment scolaire. Contrairement à ce qu'on vendait, on ne demandait pas tant que ça aux élèves de se faire leur propre avis sur les choses, de réfléchir et de réfléchir à leur réflexion. Elle avait plutôt l'impression que si on allait pas dans le sens de la pensée du prof, on avait tort. Même quand on avait raison. Même quand les possibilités étaient multiples. Sans doute qu'à la fac, c'était un peu différent. « Je ne pense pas trop que tu aurais été attentive vu que ta concentration aurait été sur mes fesses que ce que je serai en train de dire en pleine classe. » Hm alors ça, c'était pas faux du tout !

Tout juste, Auguste !

N'eeeeempêche que si les profs étaient un peu plus jeunes et plus agréables à regarder, ça ferait moins chier de venir. Peut-être qu'avec un prof un peu charmant, elle aurait fabriqué beaucoup moins de sarbacane, peut-être aussi qu'elle ne serait pas sortie par une fenêtre pendant qu'il écrivait au tableau. « Maintenant, j’espère que ce n’était réellement pas l’un de mes élèves qui n’est pas venu à mon cours, cette personne que tu viens de te taper comme tu dis, je ne serai pas trop content de devoir lui faire la morale sur le fait de penser plus avec son cerveau que son appareil génital. » Pour être honnête, elle n'en savait foutre rien ! On ne peut pas dire qu'ils avaient particulièrement parlé de cours... à vrai dire, elle ne se souvenait pas de ce qu'ils avaient pu se dire.

Franchement ? J'en sais que dalle, j'me rappelle même pas de son prénom mais si c'est vraiment un des tiens, vraiment j'me marre dit-elle en lâchant justement un petit rire Toi tu serais p'tet pas content mais moi je paierai pour voir sa gueule, celle des autres et la tienne en lui tapant l'affiche comme un gamin qui se fait choper avec un magasine Playboy. Et puis... c'est pas le principe de l'archéologie de faire des fouilles ?

Même si elle était en meilleur état qu'une momie quand même ! Mais pour ce qui était d'aller en profondeur...

Si les profs avaient tous la dégaine de Zach, ça aurait sans doute donné un peu plus envie à Gaïa de connaitre la vie étudiante mais elle avait déjà eu bien du mal à trouver la motivation d'aller jusqu'à la fin du lycée, ce n'était pas pour continuer après ça. Puis franchement, si c'était pour devoir bosser dans un fast food pour payer ses études, elle préférait encore se faire casser la gueule pour gagner trois fois plus en un seul soir que ce qu'elle gagnerait en un mois avec un petit boulot légal. Franchement, ça valait pas le coup de se crever à la tâche pour reverser tout son fric au gouvernement dans des frais d'études, des factures, des emprunts à rembourser, des loyers, ... Ouais nan, elle préférait rester dans sa merde, au moins elle faisait ce qu'elle voulait même si ce n'était pas toujours bien simple.

Si l'étudiant avec qui elle avait passé la nuit était un élève de Zach, ce serait vraiment drôle ! Ça donnait presque envie à Gaïa de se taper l'incruste dans un amphi pour suivre clandestinement un cours de Zach. M'enfin, elle risquait de vite se faire chier et de faire des sarbacanes et des avions en papier. Enfin, si certains travaillaient encore avec autre chose qu'un ordinateur. De toute manière, pour ce qui était de s'occuper de manière inadéquate, elle avait toujours été assez imaginative. « C’est certainement pas ce genre de fouilles que j’ai envie de faire » Ah ben ça, c'était bien dommage, c'était les plus intéressantes ! « et pas non plus le temps de me prendre la tête avec un gamin qui ne connait pas ses heures de cours, ça sera avec l’administration ça, et je pense qu’il ne sera pas trop content non plus »

Woooh t'es vraiment ce genre de prof relou qui fait chier pour un retard ? Va bosser dans un lycée, tu pourras te faire plaiz à martyriser du puceau

Gaïa avait bien plus souvent été en retard en cours qu'à l'heure. D'ailleurs, elle avait si souvent été en retard que ses profs se rangeant en deux catégories : ceux qui avaient abandonné de noter ses retards et d'aller lui faire chercher un billet au secrétariat qui la mettait encore plus en retard. Et ceux qui la refusaient tout simplement en cours quand elle arrivait. Ah si, en sport elle état généralement à l'heure ! Le seul cours qu'elle trouvait intéressant.

« J’espère que c’était assez bien pour qu’il détruise ses études pour toi. »

Gaïa n'essaya même pas de masquer son sourire satisfait. Si t'avais envie de faire ce genre fouilles, tu saurais que ça vaut le coup personne ne s'était jamais plaint en tout cas Puis sérieusement ? Détruire ses études pour un p'tit retard ou un cours séché ? T'as vécu un traumatisme dans ta vie d'ados pour voir la vie comme ça ? demanda-t-elle en riant

Aussi loin qu'elle s'en souvienne, Gaïa avait toujours eu du mal avec l'autorité et ses représentants. Les profs faisaient partie de ces personne dont elle avait si souvent défié l'autorité. Il en allait de même pour l'immense majorité des gens qui travaillaient à l'orphelinat. Même si son grand amour avait été policier, elle ne les portait pas vraiment dans son cœur non plus. Depuis toute petite, elle avait eu l'esprit rebelle. Combien de fois s'était-elle opposée aux adultes par pur esprit de contradiction, sans raison concrète ? Elle avait eu peu de profs qui l'avaient réellement appréciée - ou ils le cachaient bien - excepté ses profs de sport. Pourtant, elle était loin d'être une idiote, quitte à ne pas être d'accord, elle avait des arguments. Il y avait bien eu quelques enseignants qui aimaient cette facette d'elle tant qu'elle était capable d'avoir un discours argumenté. Pour d'autres, elle n'était qu'une emmerdeuse qui ne suivaient pas le joli plan bien tracé qu'ils avaient en tête. Ajoutons à ça le nombre d'heures séchées, de retards, d'absences injustifiées ou de simple départs en plein milieu du cours parce qu'elle se faisait chier... Gaïa était le genre d'élève qu'on était contente de voir quitter l'établissement.

Qu'est-ce qui t'empêche de mytho et de juste dire que y'a pas d'absents ? C'est des bureaucrates, ils vont pas aller venir vérifier que tu sais compter. elle s'interrompit et esquissa un sourire en s'approchant de lui d'un pasJ'suis sûre qu'au fond tu prends ton pied à avoir un peu de pouvoir

C'était bien beau de se cacher derrière les obligations, mais s'il le voulait vraiment, il dirait que tous ses élèves sont là et basta, nan ? Là, il avait un peu de pouvoir sur eux, sur leur avenir, sur leur réussite aux examens. S'il refusait de l'admettre, ça n'empêcherait pas Gaïa d'être persuadée qu'il y avait un peu de ça, qu'il en ait conscience ou non. Mentir, c'était tellement facile. Gaïa passait sa vie à ça. Et on pouvait parfaitement mentir pour la bonne cause ! Elle pensait à toutes les fois où elle avait affirmé être coupable d'une connerie juste pour protéger quelqu'un d'autre. Raconter des cracks, ce n'était pas toujours un truc mauvais.

J'suis morte dit-elle dans un éclat de rire A t'écouter, on dirait pas que t'as des étudiants à peu près adultes, on dirait que t'as à peine des lycéens. Moi j'pense que t'es frustré d'être coincé sur une estrade et tu te venges sur eux

Gaïa lui offrit un large sourire, amusée par sa connerie. Enfin... connerie qui dissimulait un fond de vérité pour elle.