Holy Mother of Dragons ! | Aedan

« I-i-i-i’ve got a migraine » chantait le lead-singer de twenty one pilots, dans l’iphone d’Elliott. Et bordel, qu’il comprenait ce type, là, liquéfié au fond de son lit à attendre que les heures et sa gueule de bois passent.

Tête sous l’oreiller, il aurait bien voulu dormir. Après tout, rien de mieux que de combattre une bonne cuite médiévale qu’un amont de repos suffisant et surtout… de la patience. Seulement voilà. De la patience, Elliott avait beau s’en armer, il n’en avait plus. Et ça pouvait se comprendre ! Comment le rester lorsque :

1) le voisin du dessous s’essayait au violon
2) le voisin du dessus et sa femme s’en donnaient à coeur joie
3) le voisin d’à côté venait de se découvrir une passion soudaine pour le bricolage et la perceuse dans le mur mitoyen à la chambre du brin qui commençait sincèrement à regretter de ne pas vivre en plein pâturage, entouré par les moutons et autres bovidés mangeurs d’herbe… De guerre lasse, il s’était relevé, tapant furieusement dans le mur :

- C’EST DIMANNNNCHE CONNAAAARD! TU POUVAIS PAS TE FOUTRE A LA PEINTURE COMME N’IMPORTE QUEL HIPSTER ? T’AIMES LE BRUIT , HEIN ? ATTENDS, TU VAS EN AV…

Avant même de terminer sa phrase, Elliott réalisa que ce n’était peut-être pas malin. Après tout, il était inutile d’empirer sa migraine. Il lâcha l’affaire, et partit pour la bibliothèque : là bas, il savait qu’il pourrait enfin taper la meilleure sieste de sa vie… dans le silence et en toute discrétion : après tout, les poufs de la section bande dessinées et mangas étaient d’un rare confort ; il ne le savait que trop bien !
Arrivé là bas, il s’endormit presque directement sous les yeux médusés des enfants, indignés des parents. Elliott n’en avait pas grand-chose à faire, se faisant cependant la promesse que plus jamais il ne boirait autant. Quelques heures plus tard, c’est son téléphone qui le réveilla en sursaut, la sonnerie déchirant le silence de la bibliothèque. Instantanément foutu dehors par la bibliothécaire revêche de 372 ans, il essuya le filet de bave sur sa joue, allumant une cigarette sur le trottoir. Eclaircissant sa voix, il rappela le numéro qui l’avait mis dans un tel embarras quelques minutes plus tôt. C’était son meilleur ami :

- Yo mec ! Bien ou quoi ?

- Hey ! Ben… bien, jusqu’à c’que ma sieste soit écourtée par une vieille sorcière ! Il ricana moqueur avant d’ajouter, tirant sur sa cigarette : qu’est ce que tu me voulais ?

- Ce soir, on fête la victoire de l’équipe ! « IL » y tient. Et tu sais comment c’est, un sportif en manque d’alcool et d’alibis. Si on est pas là…

«Il », c’était le sportif de la bande. Un mètre quatre-vingt-douze bien tassés, même ses muscles avaient des muscles et il aurait sans problème pu vous tuer avec son petit orteil si l’envie l’en avait pris. Difficile, donc, de refuser quoique ce fut à ce grand gaillard. Et sans parler de ça : Elliott l’adorait. Un ami comme on en faisait rarement. Le comédien soupira, pesant le pour et le contre, un sourire amusé au coin des lèvres : - Ok, ok, n’en dit pas plus. J’serai là. On va au bar ?

Le temps de se préparer, Elliott était au point de rendez vous à l’heure indiquée. Ses amis retrouvés, ils n’attendirent pas longtemps avant de se mettre dans l’ambiance : apéro qui s’attardait, alcoolémie grimpant en flèche à mesure que les heures passaient, Elliott et ses amis étaient redevenus des enfants. D’abord voulant jouer les cow-boys, ils avaient entrepris de faire glisser les verres de l’un à l’autre, d’un côté du zinc jusqu’à son extrêmité. C’était sans compter sur les genoux du client à côté d’Elliott, pile à la bonne place pour servir de but.

-Merde. J’suis désolé. Mon pote est vraiment stupide… Il donna un tas de serviettes au jeune homme de qui il tapotait les cuisses afin de les éponger, lorsqu’il aperçut une jeune femme. Manque de chance pour lui, elle aussi semblait l’avoir reconnu.

-oh putain, pas elle ! Grogna-t-il  avant de reprendre, à l’attention de sa victime accidentelle : - Je suis vraiment désolé pour ce qui va se passer.

- Ellioooott !! lança la jeune femme, hystérique. Ni une ni deux, Elliott s’empressa de prendre entre ses mains les joues du jeune homme face à lui, fermant les yeux à s’en fendre les paupières pour déposer juste sous ses lèvres un baiser digne du cinéma

- oh mon amour oui ! Un million de fois oui ! Bien sur que je veux qu’on se marie !!

Il guetta la réaction de la jeune furie et lorsqu’elle fut assez loin, lâcha son compagnon de galère : -J’suis VRAIMENT désolé de ce qui vient de se passer. Elle est tarée, j’sais plus comment m’en débara...ttends une minute… T’es le mec de Rosy, non ?

Bordel... quelles étaient les chances qu'il feigne de se marier avec le mari de son crush ?!

Ca ne lui était arrivé que très rarement, de vouloir se carapater dans les règles de l’art. Ou du moins, pas pendant une soirée : il fallait bien l’admettre, Elliott était coutumier de la poudre d’escampette lorsque les choses devenaient un peu trop sérieuses, notamment avec certaines de ses nombreuses conquêtes. Lui qui pourtant, s’était toujours persuadé qu’il fonderait une famille très jeune, c’en était différent, depuis le départ de Charlie. Son crédo n’était plus « papa, tu le seras » mais bien « FUCK YEAH, I’M NOT YOUR FA’ ! DUH ! »

Cependant là, il devait bien admettre qu’il avait fait fort ! lorsqu’il le raconterait à son frère !! il n’imaginait même pas la tête de celui-ci. Où peut-être… que si, justement. Il savait qu’il en prendrait pour son grade. De remarques graveleuses en doutes émis sur ses penchants pour les hommes, il savait qu’il devrait prendre sur lui, pour un temps indéfini : le temps que son frère ne se lasse. Ou qu’un autre truc ridicule se passe pour l’un ou l’autre de leurs compères ; Elliott en profiterait alors pour noyer le poisson, comme toujours.

Après un moment de latence, il soupira, regardant la blonde prendre les voiles, rassuré quant à la faible probabilité d’un retour de cette fille qui lui collait au basques depuis quelques jours maintenant. Pire encore ! Elle avait changé son statut facebook en « fiancée à »… Et à sa grande surprise, c’était bien le comédien, qui avait été tagué. Gosh. Plutôt mourir. Réalisant ce qui venait de se passer, il rit, pensif avant de daigner reporter son attention sur Aedan :

- Nom de dieu, j’suis vraiment désolé. T’as du me prendre pour un malade

Il soupira, arquant un sourcil : - Oh et… aussi. J’suis désolé pour ton froc. J’t’aurais bien proposé un échange mais… J’ai pas de fringues de rechange ! Rien que pour ça, il enviait les filles. Nombreuses étaient celles qui étaient prêtes en n’importe quelle situation. Un pansement ? Elles le sortaient de leur sac. Une tâche ? Pas grave, elles avaient un haut de rechange. Une envie de rafraîchir un intérieur et d’y apporter un peu de verdure ? PAS. DE. PANIQUE. Vous les verriez très vite sortir de leur énorme besace un ficus dans son pot. Des Mary Poppins en puissance, qui laissaient Elliott rêveur, et Aedan, sans pantalon sec. Parce qu’Elliott n’était clairement pas de la team Poppins. C’était même le contraire : combien de fois s’était il pointé en cours sans feuilles, sans stylo, voire même sans son eastpack déglingué par les nombreux festivals qu’il avait essuyés ?

Un peu gêné, il tenta de reprendre son calme, tant bien que mal : Bingo. J’m’appelle Bien Elliott. Et toi c’est… il réfléchit quelques secondes avant de secouer son index sous les yeux du jeune homme : me dis rien. Aedan, c’est ça ? et lui adressant un sourire, il appela le serveur avant de reprendre de plus belle : alors, quoi de neuf? j’te paye un verre, j’te dois bien ça. Pour me faire pardonner de l’arrivée fracassante !

Il commanda deux verres, sans vraiment attendre la réponse du brun, et rit à sa remarque : je… vais prendre ça pour… un acte de gentillesse et pas pour une moquerie? il rit avant d’hausser les épaules c’est gentil. Mais j’pense qu’elle a compris le message, il était on ne peut plus explicite ,non? et riant légèrement, il expliqua ça fait des jours qu’elle me colle au train, elle tourne pas rond! Et toi alors ? qu’est ce que tu deviens ? qu’est ce que tu fais là, tu te dévergondes à ce que je vois ! jusqu’à accepter l’embrassage d’un gars… on ne t’arrête plus ! Il lui adressa un clin d’oeil bienveillant. Moqueur mais pas méchant, Elliott se souvenait qu’Aedan était, selon Rosylia, quelqu’un de plutôt calme. Du moins c’était ce qu’il avait compris dans les quelques discussions passées avec la brunette. En réalité, il fallait dire qu’Elliott n’avait jamais osé poser beaucoup de questions. Moins il en savait sur Aedan, mieux c’était : savoir Rosy avec lui, ça lui faisait mal. Pas parce qu’Aedan la traiterait mal, c’était sans doute même le contraire. Mais Elliott s’était attaché à elle bien plus qu’il n’aurait osé le penser ou voulu l’admettre...

- Content que tu le prenne comme ça… à ta place… j’me serais probablement foutu une claque… Voire deux ! Il ne savait plus où se mettre. Chose peu surprenante d’ailleurs, son regard fuyant, tentant d’échapper à celui de son interlocuteur. Rire gêné, il passa une main sur son visage si détendu en apparences là où, pourtant, il était intérieurement déconfit. Bordel, mais bordel ! Elliott t’es qu’un con! il adressa un sourire convenu et poli à Aedan. Après tout, le brun n’avait pas à subir ses états d’âme  – Il en avait déjà bien trop subit à son goût pour ce soir. Cependant, Elliott, peu à peu se rendait compte de la catastrophe. C’était certain : Roman allait le pulvériser, lorsque le soleil serait levé. Pourtant, son ami n’était pas le dernier à faire la fête. Combien de fois avait il fini par cuver son vin sur le clic-clac du comédien ? Mais cette fois, c’était différent. Si Elliott avait le malheur de s’être fait prendre en photo à embrasser Aedan, il se serait peut-être débarrassé de la furie blonde, mais accueillerait à bras le corps les unes des journaux sensationnalistes répugnants. Ces paparazzis qui s’amusaient à détruire la réputation de ses pairs, parfois – souvent sans raison le mettaient hors de lui. Il fronça les sourcils, guettant rapidement par dessus son épaule. Pas par parano, seulement par précaution. Se tranquilliser une bonne fois pour toute. Et une fois tout doute éloigné, il souffla un coup, avant d’adresser un sourire un peu gêné à Aedan :

- Désolé. J’ai cru voir quelqu’un.

Définitivement rassuré, il se concentra de toutes ses forces ou presque pour enfin retrouver le nom du brun face à lui. Et lorsque son interlocuteur lui signifia qu’il ne s’était pas trompé, il sortit son plus beau jeu d’acteur. Mains jointes au dessus de la tête, secouées tantôt à gauche, tantôt à droite, il frappa ensuite deux coups de poings sur son coeur, avant de lancer : -Public adoré… c’pour toi ! Oui… j’ai la gagne modeste... et riant légèrement, il lança un regard instigateur à Aedan : mais… au fait, dis moi, j’ai gagné quoi, exactement?

Plus sérieux, il écouta le jeune homme lui avouer que parfois, il avait la curieuse sensation d’être suivi. Il grimaça. Depuis qu’il avait du succès, il avait été confronté à cette situation plus d’une fois. La première lui avait d’ailleurs glacé le sang. La dernière, cette blonde qui s’était entichée de lui sans aucune raison apparente, n’avait fait que le saouler profondément. Lassé. Il mordilla sa lèvre inférieure et haussa les épaules, souriant : eh bien… j’espère que ce n’est qu’une impression : suivre les gens… c’est cool sur les réseaux sociaux ; beaucoup moins dans la rue !

Et plus sérieux, Elliott avait fini par lui poser la question qui lui brulait les lèvres. La réponse n’était pas forcément celle qu’il attendait, mais au moins, Aedan eut le mérite de faire sourire le jeune homme : - Oh, ce n’est pas forcément une mauvaise image tu sais… C’est toujours mieux, d’être quelqu’un de calme : au moins… tu ne te retrouve pas à devoir embrasser un mec dans un bar. En théorie. ricanant, il appuya sur ses deux derniers mots. Car si quelqu’un de plus sérieux que lui n’était pas censé se retrouver à devoir embrasser qui que ce soit, il ne fallait pas oublier ce risque qu’Aedan avait couru, ce soir : s’il n’avait rien demandé, il s’était pourtant fait embarquer dans les plans foireux du comédien, qui lui adressa un sourire. Hochant la tête, il reprit : j’en doute absolument pas ! d’ailleurs… J’ai une petite soif, pas toi ?Qu’est ce que tu veux boire? Il attrapa la carte du jeune homme et la lut avec attention : eh bien… félicitations ! Tu ne dois pas manquer de clients ici : c’est pas c’qui manque, les cas indéfendables, dans les rues de Washington! La rangeant soigneusement dans sa poche, il sourit de plus belle et haussa les épaules, riant, surpris de sa remarque qu’il n’avait pourtant pas volée : Ahhh… pas loin. J’hésite à m’lancer là dedans en professionnel, il faut du talent pour ça ! Et puis… tu sais ce que c’est, il y a beaucoup d’appelés et peu d’élus ! Faut que j’m’entraine encore un peu ! riant de plus belle et de bon coeur, il lui adressa un clin d’oeil avant de poursuivre Mais… en attendant, j’suis comédien de théâtre. Et ça marche plutôt bien à vrai dire ! souriant, heureux et fier comme un enfant annonçant une bonne note à ses parents, il finit par appeler le serveur pour commander un rhum coca, laissant à Aedan le temps de choisir ce qu’il voudrait...

Aedan ? Violent ? Ces deux termes dans la même phrase auraient pu faire sourire Elliott, voire même le faire marrer. Le juger de prime abord, ce n’était pas la première chose qu’il aurait remarquée chez le brun qui lui faisait face. En réalité C’était même le contraire, le voyant comme quelqu’un d’amical, bien que réservé. Le genre d’amis dont Elliott s’entourerait volontiers s’il connaissait des gens moins aptes à boire, plus à se souvenir de ce qu’ils avaient fait la veille…

Il adressa un sourire à Aedan, amusé : -Promis. J’tâcherai d’m’en souvenir et de ne jamais te chercher de noises ! riant légèrement, il récupéra les verres commandés quelques secondes plus tôt : il ne pouvait se résoudre à laisser Aedan l’inviter ; il l’avait trop fait morfler pour ça. Après tout… il lui devait bien ça ! Elliott sourit en lui tendant l’un des deux verres, avant de lever le sien :

- Dans ce cas… j’savoure ma victoire ! Santé, Aedan ! Et lui adressant un clin d’oeil, il expliqua : j’tenais à t’offrir celui-là : j’te dois bien ça ! Mais… si tu veux… j’te laisserai l’honneur de la seconde tournée !

Il avala une gorgée de son verre, amusé par sa réflexion et haussa les épaules, arquant un sourcil :

- OK. Celle là, je ne l’ai pas volée. Il passa sa main dans ses cheveux qu’il plaqua légèrement en arrière, suffisamment pour qu’ils ne lui tombent pas dans les yeux comme ils pouvaient le faire systématiquement . Et les yeux rivés sur son verre, il risqua : non… En fait, j’l’avais presque oubliée ! Plutôt… Un paparazzi. Ou pire encore ! Imitant des vagues avec ses doigts, comme pour invoquer un fantôme, il prit une voix d’outre tombe avant d’ajouter, plus théâtral que jamais : mon agent ! c’est mon meilleur pote. Mais… il protège son gagne pain ! c’est sur lui qu’ça retombera si je fais des trucs pas très catholiques ! C’est… le papa qui me gronde quand je vais trop loin. Paradoxalement… il n’est pas le dernier à finir à l’envers !

Elliott rit en évoquant son ami. Tout d’abord vu la façon dont il parlait de lui, mais aussi et surtout à cause de ces soirées qu’ils avaient passé ensemble. Elles se comptaient par milliers, tout comme les bribes de souvenirs qui revenaient peu à peu à la surface, rendant Elliott presque nostalgique. Digne d’une scène pathétique, au ralenti, dans l’un de ces nanars de l’après midi que martelaient la télévision … Haussant les épaules, Elliott se mit à rire : - soit ils pensent qu’on va faire attention à eux… soit… ils ont alzheimer et espèrent secrètement qu’on va les ramener chez eux ! ou...peut-être qu’ils sont trop sympas et veulent juste nous prévenir d’un lacet défait qui pourrait nous faire tomber ? Clairement, il y avait peu de chances qu’une telle chose soit réelle. Mais il préférait dédramatiser : pas question de se laisser abattre par de minuscules inconvénients : Elliott adorait son métier, et prenait généralement plaisir à être arrêté dans la rue. A vrai dire… il ne s’y faisait pas encore tout à fait, toujours un peu surpris, alors qu’on lui demandait un selfie lorsqu’il faisait ses courses…
Il se mit à rire de bon coeur, avant de reprendre de plus belle, amusé : - Fais gaffe. J’pourrais croire que t’y as pris goût ! et prenant une autre gorgée de son verre, il haussa les épaules J’suis une tombe !

Et adressant un sourire à Aedan, il l’écouta attentivement, fronçant les sourcils, presque surpris par autant d’honnêteté : -Wow. Franchement, respect. C’est rare, de voir des gens aussi honnêtes que toi. C’est super cool de ta part. Ca doit être super intéressant, comme métier ! Tu dois avoir des tas d’histoires de fous ! l’être humain pouvait être tellement tordu… Il n’osait même pas imaginer toutes les affaires et histoires différentes qu’Aedan et ses collègues avaient pu voir, depuis le début de leurs carrières respectives… Il se demandait tout de même si elles étaient aussi tordues que celles de ces émissions à sensation qui passaient tard le soir.
Hochant la tête, il sourit, observant au loin ses amis, un sourire moqueur fiché sur le visage : plus le temps passait, plus ils titubaient et pour une fois, Elli était assez clair pour les observer objectivement. Il arqua un sourcil et pensa y’a des photos qui mériteraient d’être prises… pour leur rappeler la caisse médiévale dont ils n’auront plus aucun souvenir demain!

- En ce moment, je joue dans l’adaptation d’une pièce contemporaine française. Ca s’appelle « je préfère qu’on reste amis ». Ca raconte l’histoire de deux meilleurs amis, un homme et une femme. Bien entendu, la demoiselle tombe amoureuse de son meilleur ami : moi. Il prit un air dédaigneux, pas sérieux pour un sou, comme le laissait d’ailleurs entendre son ton, moqueur : en même temps… comment ne pas tomber amoureuse d’un tel corps d’apollon ? Ricanant, il conclut : j’sais ce que tu vas me dire : l’histoire est cliché. Mais justement, c’est sur ça que la pièce joue. Et puis y’a beaucoup d’humour. On s’amuse bien, sur scène. Et apparemment… les gens ont l’air de bien rire dans la salle, aussi ! En tous cas… ce serait un honneur de te compter parmi mes invités ! Il lui sourit de bon coeur et posa son verre, observant Aedan. Ce n’étaient pas seulement des politesses, c’était sincère : il aimait la compagnie de celui-ci, agréablement surpris par cette discussion. Et il hocha la tête, confirmant :

- A cette rencontre cheloue et… à la blonde. Sans qui on ne se serait p’t-être pas croisés !

Elliott ne put s’empêcher de rire, à Aedan fronça les sourcils face à l’expression et aux paroles d’Aedan. Secouant la tête et les mains devant lui, comme pour suggérer, dans un jeu d’acteur bien trop prononcé qu’il ne voulait pas d’ennuis, il lança, sourire aux lèvres : « oh… non ! j’te crois sur parole ! Cependant… si je n’en suis pas la cible, j’avoue que je serais bien curieux, de voir c’que ça donne , du taekwondo ! » et riant légèrement, il conclut : « c’est tout à ton honneur. Personnellement… je serais incapable de me défendre : pire encore, je prends la fuite face à l’adversité ! » et tout en riant légèrement il ajouta, prenant une voix d’enfant de cinq ans tout au plus: « tu m’apprendras, dis ? » eh, quoi ! On attrapait pas les mouches avec du vinaigre après tout ! Un enfant, ça attendrissait tout le monde, non ?
Lorsque leurs verres arrivèrent, ils finirent par trinquer et à la remarque du brun, Elliott hocha la tête avant de confirmer : « ça, c’est le moins qu’on puisse dire ! Il fait le malin en public mais en vérité… il doit être pire que moi ! » il adressa un clin d’oeil à Aedan avant de lancer, amusé : « tu gardes ça pour toi, hein ? Secret entre un professionnel et son client ! » car oui. Elliott était bien décidé à faire appel à Aedan en cas de pépin : ils ne se connaissaient que depuis peu, mais pourtant, le jeune homme lui était sympathique ; et Elliott avait tendance à se fier à ses instincts, qui ne le trompaient que très rarement.
Là, Elliott réfléchit un court instant. A vrai dire, il ne s’était jamais posé la question ainsi : lorsque Roman l’agaçait, il ne perdait pas une occasion de le lui rappeler. C’était vrai en tant qu’ami, ça l’était tout autant en tant que client… Peut-être plus : avec son agent, Elliott savait se montrer intraitable, parfois même capricieux. Pas à cause de la notoriété qui lui monterait à la tête, très peu pour lui. Il avait toujours su garder les pieds sur Terre, notamment grâce à son entourage qui lui rappelait sans cesse d’où il venait et le rassurait durant ses moments de doute. S’il se montrait capricieux avec Roman, c’était tout simplement que le voir galérer l’amusait. Petit con ? Noon, si peu, vous croyez ?
« ça va, parce que c’est mon meilleur pote depuis toujours. Mais j’avoue que si ça avait été un mec sorti de nulle part… je lui aurais probablement fait sa fête, à ce naze ! » riant, il prit quelques gorgées de son verre et manqua de s’étouffer à sa remarque. Il posa son verre, éclatant de rire :

« Grave ! Viens que je te présente à la troupe ! On t’embauche direct ! » il lui adressa un clin d’oeil moqueur avant d’assurer : « promis: ça ne sera pas une promotion canapé ! Et puis… j’adorerais une concurrence comme la tienne, on pourrait même être les frères ennemis ! Comme ceux qu’on voit dans les journaux ! »
Plus sérieux, il écouta Aedan lui parler de son métier, presque subjugué. Avocat. C’est qu’il fallait en avoir dans la caboche, pour en arriver là ! Et avoir une sacrée mémoire et un sens de l’observation aiguisé pour pouvoir plaidoyer comme il se devait ! Pour Elliott qui était incapable de dire ce qu’il avait mangé à midi, ça relevait presque du mentalisme, voire même de la Magie !
Il hocha la tête, avant de proposer : « tu sais quoi… on pourrait échanger nos numéros si tu veux ! Comme ça, j’pourrai t’envoyer les dates ! Bien évidemment, y’aura zéro obligation de venir, c’est juste que ben… fatalement, je les ai, moi ! Ça t’évitérait de chercher ! »

Jouant avec son verre, il hocha la tête, pensant à Shakespeare qui devait paisiblement l’attendre, pattes en rond sur son lit, et l’engueulerait lorsqu’il rentrerait, trop tard à son goût : l’heure des croquettes, c’était sacré. Ce n’était pas chose à faire en retard.

« moi aussi j’ai un chat ! Il s’appelle Shakespeare ! » il rit, avant de lui confier : « en fait… si je m’écoutais, j’aurais carrément une ménagerie. Mais c’est pas pratique à embarquer, lorsque je pars en tournée. Alors que mon pépère… j’l’ai habitué à voyager avec moi : il ne me quitte jamais ! » souriant, il demanda à Aedan « il est comment le tien ? Et il a quel âge, d’ailleurs ? »

Lancer Elliott sur les animaux ? Mauvaise idée, si l’on voulait que la discussion tourne court ; il en était gaga, littéralement, et ça frôlait presque le ridicule !

Elliott se mit à rire, lorsqu’Aedan lui proposa de ne pas lui faire de démonstration à ce moment précis. Sur l’instant, Elliott était légèrement déçu. En vérité, il était très curieux de voir ce que cela pouvait donner, et ne doutait pas du caractère impressionnant d’une telle performance, mais pour autant, aussi alcoolisait était il, il se disait que non, ça n’était pas forcément une très bonne idée de se retrouver à faire une démonstration d’arts-martiaux dans un bar si bondé qu’il en devenait difficile d’inspirer sans bousculer quelqu’un.Malgré tout, il ne put s’empêcher de lui offrir une moue faussement déçue : « carrément ! Et fais attention, je te prends au mot ! Si j’ai pas ma démo : je boude ! » là, il se mit à rire de nouveau, adressant un clin d’oeil malin au brun face à lui et hocha la tête, un peu surpris de la philosophie soudaine que prenait la tournure de la discussion : « hm. J’suis assez d’accord avec toi. Mais… pour autant, je crois que nos limites ne doivent pas nous bloquer. Pour ça, que j’adore repousser les miennes ! » Et le pire dans tout ça, c’était encore qu’il ne plaisantait pas là dessus : pour le comédien, les limites étaient faites pour être repoussées, sans cesse apprendre de soi même et arriver à contrôler ses peurs, c’était là une des clés de son bonheur.

Et de fil en aiguille, ils s’étaient mis à parler de Roman, le meilleur ami d’Elli, et surtout, son agent. Quand on y pensait, c’était d’ailleurs un miracle que les deux compères aient toujours la capacité de faire les quatre cent coups ensemble : après tout, Elliott savait être odieux, lorsque la fameuse mouche de la grosse tête le piquait. En réalité… s’il avait embauché Roman, c’était d’ailleurs pour cette raison. Eux qui avaient toujours été comme les deux doigts de la main depuis petit, il savait que son comparse n’hésiterait pas à lui remettre les pieds sur Terre ou le cas échéant, trois claques derrière la tête avant de le faire se remettre au travail dans l’instant. Entre eux, c’était donnant donnant. Elli, lui, apportait la matière première, Roman, la préservait quelqu’en fut le prix. Et souvent, Elliott s’amusait à le faire tourner en bourrique, rien que pour sa satisfaction personnelle… A la remarque d’Aedan, il arqua un sourcil amusé « Wow ! Alors là, je suis percé à jour ! » il se mit à rire avant d’ajouter : « oui. J’admets que j’y vais d’ailleurs souvent un peu fort. Mais… sans ça, il est fort probable qu’il s’ennuierait, alors… » haussant une épaule, il conclut, s’enquiérant tout à coup de ce qu’Aedan pourrait bien penser de lui -aka : préoccupation de type passablement émêché- « bordel, tu vas me prendre pour un type totalement antipathique !  Mais… promis. J’sais être autre chose qu’un connard, hein, crois pas !» Et riant de nouveau, il avait proposé à Aedan de lui garder une place pour l’une ou l’autre de ses représentations. Observant la carte du jeune homme qu’il rangea précieusement dans sa poche, il hocha la tête : « promis. Tu seras au courant dès que… ben… que je serai plus bourré ! » riant bêtement, il finit par lui lancer après avoir manqué de s’étouffer « fais gaffe, mec, j’vais finir par croire que tu me kiffe hein ! » là, il lui adressa un clin d’oeil et redevint instantanément sérieux : fallait pas lui parler de son chat : erreur de débutant ! Heureusement pour lui, Aedan semblait tout aussi gaga de son chat. De nouveau, il rit de bon coeur, haussant une épaule : « arg. Touché en plein coeur. J’avoue, j’suis absolument pas inventif là dessus. Shaky a eu de la chance de ne pas naître quand j’étais en médecine ! Imagine un peu « stéthoscope ! Viens ici ! » » il secoua la tête « finalement… Shakespeare, c’est pas si mal ! » et il se mit à rire, en entendant le nom du chat d’Aedan : « laisse moi deviner il est tout blanc ! » et regardant la photo, il ramena son poing devant lui « yes Gagné ! Pourtant, y’avait AUCUN indice qui aurait pu présager ton originalité ! » il se mit à tousser exagérément, un sourire amusé s’étirant sur son visage. Là, il chercha dans sa poche pour en sortir son téléphone sur lequel il fit défiler les photos de son chat « bien sûr, que j’ai trois cent gigas de photos de mon chat ! Je ne serais pas un très bon propriétaire, sinon ! » et souriant, il hocha la tête « Shaky a 5 ans. Ils pourraient grave s’entendre ! c’est une très bonne idée ! Tu sais quoi, on a qu’a reparler de tout ça demain. Au moins, on sera certains que ce n’est pas l’alcool qui nous fait dire des conneries plus grosses que nous ! » proposa-t-il, avant de signifier sa poche : « et puis, de toutes façons, j’ai ton numéro, n’est ce pas ? »

Elliott se mit à rire un peu bêtement. Pourtant du genre à tenir la toile en temps normal, il fallait tout de même être honnête : cette fois-ci, il était clairement sur la mauvaise pente. Pas tout à fait saoul, loin d’être sobre pour autant, il avait besoin de nettement se concentrer pour comprendre ce que son interlocuteur lui disait. Pas seulement à cause de l’alcool, mais aussi à cause du bruit ambiant, y’avait du monde, ça riait, ça chantait, ça parlait fort pour couvrir la musique qui crachait. Demain, ils auraient tous les deux un sérieux besoin de paracétamol : à ce rythme là, il valait sans doute mieux avoir des actions chez Doliprane, c’aurait été carrément plus avantageux pour eux.
Lorsqu’Aedan se mit à lui parler du temps qu’il avait pris pour façonner son corps, Elliott fronça les sourcils, un peu décontenancé. Pire encore, il se demandait si l’alcool lui faisait imaginer des trucs ; s’il comprenait réellement. Cependant, lorsque le brun attrapa sa main pour la plaquer sur son torse, il n’y avait plus de doute possible. Oui, le comédien avait bel et bien compris. Faisant mine d’être impressionné, il balada sa main, mort de rire, sur le torse de son ami et lança « woow ! Eh, tu sais faire la danse des pecs, de Terry Crews ? Parce que là, j’t’érigerai volontiers un autel chez moi, s’tu fais ça, j’le promets ! » ricanant, il rappela le serveur, avant d’ajouter, insistant « non mais, sérieux, tu devrais faire une chaîne youteub ! Ça paye un max askip ! Imagine un peu le truc : Aedan inshape !  Ça claque ! » il se mit à rire et conclut, on ne pouvait plus sérieux « et le point positif, c’est que si tu as besoin d’un agent -parce que oui, c’est évident, tu vas percer !- j’te présenterai Roman ! Ça lui changera, d’avoir quelqu’un de calme et responsable à s’occuper, j’suis sûr qu’il sera content ! » Elliott se mit à rire de nouveau et commanda un whisky coca, écoutant Aedan le rassurer : visiblement, il ne le prenait pas pour un connard. Là, Elliott fut surpris. Il ne savait pas vraiment si c’était censé le rassurer, car en général, c’était justement sous cette carapace de petit con qu’il se cachait, histoire de cacher son coeur bien trop abîmé par les aléas de la vie et les pique assiettes qu’il avait rencontré sur son chemin. Mais à le voir sourire ainsi, il fallait croire que pour ce soir, il avait décidé que ce ne serait pas un problème. Lui adressant un sourire amusé, il répondit : « bon… bah… merci ? j’crois que je vais prendre ça pour un compliment. Même si, en toute objectivité, si t’as pas envie de me mettre ton poing dans la gueule, c’est probablement parce que 1) je n’ai pas encore eu le temps de te montrer mes talents d’emmerdeur. Tu verras. Ca arrive bien plus vite qu’on ne le pense ! Et 2)… je crois qu’on est bien trop bourrés pour se taper dessus » avait il lancé un peu moqueur, tapant amicalement l’épaule d’Aedan.

A voir le brun face à lui douter de ses facultés à se souvenir de ses promesses le lendemain, Elliott fit un semblant de moue. Pas du genre à être vexé pour si peu, il sortit son téléphone et se mit une alarme pour le lendemain avec un titre. Là, il expliqua « et voilà. Alarme à 19h, pour me laisser le temps de décuver. Si tu reçois un message après cette heure là, dis toi que tu pourras assister à une pièce au premier rang, tout ça grace à Apple. Il est quand même vachement sympa, Steve Jobs, hein ? Et si tu le reçois avant… tu pourras… me remercier. J’aurais pas eu besoin de l’alarme » il se mit à rire.Ce stratagème, il l’avait mis en place avec Roman et son frère, lorsqu’ils sentaient que le point de non retour avait été ou allait être atteint. Bien sûr, parmi ses alarmes, la majeure partie étaient des conneries, en témoignait le dernier en date : « accrocher un string en dentelle rouge au mur de ma chambre » Mais Elliott pouvait vous l’assurer : sur le moment, il y avait eu une logique. Seulement, maintenant qu’il était sobre, elle lui échappait totalement, à son plus grand damne.

Là, il rangea son téléphone et approcha son visage de celui d’Aedan, un sourire carnassier fiché sur son visage. Une fois, deux fois, il haussa les sourcils comme pour lui faire du charme, avant de déposer son menton dans la paume de sa main, son coude reposant sur le zinc « oh, j’suis si grillé que ça mon chou ? Mais attends… tu m’kiffe, j’te kiffe… qu’est ce qu’on attend ? Les toilettes sont juste là bas ! » et il désigna une porte, avant de se raviser « oh. Non, attends. Ca, c’est le bureau du directeur. Il serait pas très content, si on se pécho sur sa compta ! » il se mit à rire à gorge déployée, agitant sa main devant lui, littéralement mort de rire. Stéthoscope. Mon dieu, pauvre animal. Si Aedan faisait vraiment ça, il faudrait achever la pauvre bête, quel nom horrible, comment vivre avec ça ! « non, mec, fais pas ça, ton animal va se jeter sous les roues d’une voiture, tellement il pourra pas supporter ce nom douteux ! » il éclata de rire, avant de faire mine de faire une révérence : « merci, merci ! j’voudrais remercier mon papa… ma maman et… ben… mes yeux, ç’aurait été beaucoup plus difficile en étant aveugle, puisque j’aurais pas pu voir la photo... » il ne se rendait pas encore compte, mais clairement, le point de non retour avait été atteint. Stop Elliott. Il est encore temps de faire marche arrière. Calme toi, dis que tu es fatigué, c’est mieux que d’admettre qu’on est bourré. Et surtout, vas te coucher, en espérant que Roman n’ait rien capté, demain matin. Ou pas. Elliott prit son Gemini Cricket imaginaire de sur son épaule et l’écrasa mentalement sur le bar. Un criquet mort, ça parle nettement moins, étrangement.
« nos chats ? Meilleurs potes ? Trop bien, j’adore le concept ! Viens quand tu veux ! j’te donne l’adresse, attends ! » il attrapa son téléphone et écrivit son adresse, avant de prendre la carte d’Aedan, pour y récupérer son numéro « et voilà. Maintenant, tu sais où j’habite. Mais ne le dit à personne hein ? Surtout pas à miss gros lolos ! j’ai pas envie de la retrouver devant ma porte demain matin, à la place du journal ! » il sourit et hocha la tête amusé : « je comprends. Shaky ne sort pas non plus. J’ai trop peur qu’il lui arrive quelque chose. Et puis, il a été si habitué à sa vie en appart, que… je crois qu’il paniquerait, dehors ! » il se mit à rire, avant de grimacer en recevant son doigt en plein front. Fronçant les sourcils, frottant son front, il fit mine de bouder « maiiis ! c’est justement ce que j’étais en train de te dire ! Me tape paaaas ! j’suis célèbre ! On abime pas un acteur comme ça bordel ! j’fais quoi, demain si j’ai un énooooorme gnon sur le front ? Cette gueule, très cher, c’est mon gagne pain ! »

il éclata de rire, d’autant plus lorsqu’il vit le serveur arriver, interrompant leur discussion : « quoi, j’en fais trop ? » pas de réaction du serveur, ça le perturbait. Tentant d’avoir une réponse, il insista «  j’en fais trop, hein ? » serveur hermétique. Ca rendait Elliott fou, et surtout, mort de honte. Soudain, il se sentit immensément minuscule dans la foule des gens présents dans le bar « ok. J’en fais trop. Aedan, j’peux te demander de me redonner une pichenette s’il te plait ? »  Ben quoi, ça lui remettrait sans doute les idées en place ! Non ?

« Saint Aedan » ? non, mais, ça devenait carrément n’importe quoi là ! Elliott se mit à rire, surpris. Et pourtant, il n’y avait pas vraiment de quoi l’être : après tout, ce n’était qu’une suite logique à cette discussion absurde qu’ils avaient entretenue jusqu’ici ! Ou… vraiment ? En réalité, Elliott n’était plus certain de rien, encore moins de ce qu’il comprenait et ne comprenait pas. C’était officiel : il était complètement bourré. Car lorsqu’Aedan tenta une danse des pecs, Elliott, lui, fit mine de commencer une prière louant le saint qu’il avait en face de lui. Enfin… sa représentation d’un saint. Car avec le recul, il était peu probable qu’un saint se mette un jour à faire une telle danse, dans une église. C’était sans doute un blasphème, mais en étaient ils à ça près ?

Mort de rire, Elliott applaudit, avant de répondre : «oh, tu en doutais ? Mais je crois que c’est pour ça, qu’on s’entend bien. À ce qu’on dit, j’suis grave con, moi aussi ! » et justement, à cet instant, son ami se mit à le lui rappeler « tu voiiiis ! Même toi, t’es d’accord avec moi ! j’ai raison ! j’suis super con ! » il se mit à rire, avant de demander « t’as mieux à faire que d’aller sur youtube ? Genre quoi ? Raconte ! » alors là, Elliott était carrément curieux : qu’est ce qu’Aedan pouvait avoir de mieux à faire que de vendre ses fesses pour un paquet de chips ou une application débile pour un quelconque smartphone ? Non, vraiment, il ne comprenait pas ! c’était ça, qui rapportait le plus, de nos jours ! Et Aedan ne voulait pas de cette vie ? Comment était-ce possible ?! Elliott arqua un sourcil, avant de répondre, d’un sourire amusé : « alors ça, c’est super sympa mon pote, de me laisser la place et de ne pas me faire d’ombre ! Mais tu sais quoi ? j’suis sûr que ton visage passerait vaaaachement bien, à l’écran ! Imagine, un film avec nous deux en coéquipiers ? Obligé, on fait le remake de badboys, ou… en tous cas, un truc avec un duo trop cool ! » Elliott imaginait déjà, Aedan et lui, dans n’importe quel remake de buddy movies. C’était d’ailleurs presque trognon, tant de sentimentalisme alcoolisé dans un seul homme. Et secouant les mains devant lui, ainsi que sa tête, il finit par répondre : « non ! Non non, je sais que tu vas me battre par contre… j’suis pas si gringalet, mon pote, fais gaffe ! » et riant, il gonfla son biceps avant de le lui faire tatouiller : « regarde ! Ça, c’est des mois de pompes, mon pote ! Et que dire de mes mollets ! Une heure de course tous les matins, qu’il y a dans chaque ! » ce qui représentait des kilomètres à son actif. Et ça, Elliott n’en était pas peu fier, c’était le moins qu’on pouvait dire.

Et puis Aedan lui fit remarquer qu’il ne savait plus faire la différence entre des chiottes et un bureau. Impossible pour Elliott d’admettre une seule seconde qu’il était saoul, plutôt mourir : chez ses amis et lui, c’était un aveu de faiblesse : le premier qui le disait, avait un gage. Il le savait, et ça restait une habitude chez lui. Et puis, si la personne en face était moins torchée que lui, alors, elle le saurait d’elle même ! Pas besoin de mots ! Souriant, il lança « ben… il fait peut-être un travail de merde, tout est une question de point de vue ! En tous cas, comme t’es pas un pote… de merde, à l’inverse de son taff, tu peux être assuré que tu auras de mes nouvelles demain ! » Le point de non retour ? Il avait été pulvérisé. Probablement d’ailleurs, que c’est pour cette raison, qu’Elliott ne trouva pas étrange de demander Aedan en mariage, juste pour déconner. Ben quoi ? Après tout, s’ils se kiffaient, pourquoi ne pas passer le pas, il n’y avait pas de raison ! Ah, si. Peut-être celle ci : Saoul, Elliott aimait tout le monde. Et se marier avec tous les clients du bar, ça faisait quand même vachement de personnes. En fait, même en cas de polygamie, il n’était pas même certain que ce soit possible, tous pays confondus, de se marier à autant de gens en même temps. « naaaan ! j’hallucine pas ! j’suis pas fou ! Je… faisais semblant d’écraser Gemini, comme Pinocc... » il s’arrêta net, réalisant que ça n’était pas plus crédible, lorsqu’il le verbalisait : « ok, t’as raison. Je suis totalement jeté, comme type ! » et il sursauta au rire franc de son ami : « mais visiblement, j’suis pas le seul ! Yeeeeppa ! » avait il lancé plein d’entrain, mort de rire, tandis que sa main s’élevait dans les airs, invitant Aedan à un high five digne de ce nom. Ensuite, il récupéra son verre, dont il prit une gorgée, et reprit : « maiiiis miss gros lolos ! La blonde de tout à l’heure ! Imagine, elle frappe à ma porte demain ! l’angoisse ! » Il se mit à rire, avant de sortir son plus beau jeu d’acteur exaspérant, et de rétorquer, faussement outré : « comment ça ‘’pas une star interplanétaire’’ ? Bientôt, j’ferai de l’ombre à Kim K et tu t’en mordras les doigts, et toc ! » il se mit à rire, avant d’hausser les épaules « ouais. T’as agrandi mon pi… ah non. Mon gros nez a toujours été là, c’pas d’ta faute ça. Bon bah… faut croire qu’t’as rien fait de spé alors ! t’as évité le bûcher de peu ! » conclut-il, s’essuyant le front, amusé, à plus forte raison lorsqu’il reçut la pichenette demandée. Fronçant le nez, il se mit à rire, hochant la tête « grave. J’ai un truc à te dire, mon ami … j’crois qu’on est pas sortables. » ou peut-être un à la fois. Mais les deux en même temps, c’était comme libérer le kraken : on ne savait pas à quoi on s’exposait, et il était loin d’être prouvé qu’on avait signé pour ça, visiblement...

Si on avait un jour dit à Elliott qu’il passerait une soirée aussi sans queue ni tête avec le meilleur ami de son frère… il ne l’aurait pas cru. Tout d’abord, parce qu’il n’avait pas encore compris, qu’Aedan et lui se connaissaient déjà – fallait dire que bientôt, beaucoup plus d’alcool que de sang coulerait dans ses veines et que malgré ses affirmations ; Elliott n’était plus si sobre, depuis déjà de nombreuses minutes, peut-être même des heures…
Mais aussi et surtout parce que : MERDE, embrasser un gars sur la bouche ? Loin d’être homophobe -il partait du principe que chacun aimait qui il voulait ; tant que tout le monde était heureux, alors pourquoi hésiter?- jamais il n’aurait pensé qu’un truc pareil pourrait lui arriver. Comme quoi, finalement, lui qui pensait être allé au maximum de ses capacités de débilité, arrivait toujours à se surpasser. Et il aura fallu qu’il finisse totalement bourré, pour qu’il s’en rende compte : restait encore à déterminer le sens de cette nouvelle : était-elle bonne, ou mauvaise ? A l’instant T, Elliott s’en foutait. Trop alcoolisé pour avoir une logique et un raisonnement clairs, il avait plutôt pris le parti de continuer à boire, en disant des conneries plus grosses que lui.

A l’idée de son comparse, Elliott se frotta les mains. « une chaine youtube ??? bordel, carrément, faut qu’on fasse ça, ce serait gé,nial !!! » avait-il lancé enthousiaste comme jamais. C’était la meilleure idée qu’il ait jamais entendue, et de loin ! Mieux encore que celle évoquée juste avant, d’être humoriste. Pas qu’il ait été contre, mais son talent à lui, était avant tout celui de faire vivre des personnage au travers des mots des autres. Les siens, il n’avait encore jamais pensé à le faire . Par pudeur ? Par peur ? c’était encore peut-être, un mélange de tout ça : pour coucher ses maux sur du papier, il en fallait, du courage. Et Elliott n’était pas encore prêt, pour ça. « vieeens ! On fait ça tout de suite ! Comment ça s’appellerait ? Hm… attends. Les stéthoscopes ? Nan. Ca fait vulgarisation scientifique, on va nous prendre au sérieux, les gens seront VACHEMENT déçus. » ricanant, il ascéna un léger coup de poing amical dans le bras de son ami « hééé ! c’est toi, qui te prosterneras, ouais ! » mais lorsqu’Aedan résuma leurs aventures nocturnes, il ne put faire autrement que : un : ouvrir de grands yeux ronds, mi offusqués, mi… cherchant une logique à toute cette merde et 2) ouvrir une bouche aussi ronde que ses yeux évoqués un peu plus tôt, ce qui lui donnait, en toute objectivité, l’allure d’un poisson mort « eeeeuh… ok. Tu marques un point. » il termina son verre, et poursuivit, mort de rire : « alors. J’sais pas si Hollywood voudra des délires de deux mecs bourrés, mais essayes Netflix, ils prennent tout et n’importe quoi ! » il lui adressa un clin d’oeil. Bon, ok, cette punchline inoffensive ne l’était pourtant pas tant que ça : Elliott, en réalité, était stupéfait, de voir tout ce que Netflix proposait. Bien évidemment, il y avait des choses géniales. Mais pour d’autres… n’était-ce pas un peu de l’abus ? Enfin. Lorsqu’il y pensait, il tentait de se dire qu’il en fallait pour tous les goûts, tout simplement… Mais quand même.
Hochant la tête, il observa Aedan, on ne pouvait plus sérieusement : « ben carrément ! t’es trop swagg ! » et riant de plus belle en voyant les moues et les pauses de l’avocat, il surenchérit, imitant une caméra avec ses mains « Oh fais la moue, oh oui ! Fais la moue pour la caméra ! c’est sexy tout ça ! » n’importe quoi. Ca partait clairement en steak, et c’était loin de déplaire à Elliott !
« Mais grave ! Genre… bad boys version redneck ! j’aurais un mulet à faire frissonner les demoiselles, et toi, une moustache paillasson qu’on aura envie de t’arracher avec les dents ! Tellement 80’s !! » wooow Elliott était il parti en roue libre ? Oui. Avait-il atteint le point de non retour ? Difficile à dire. Ce qui était certain en tous cas, c’était qu’il était mort de rire, d’autant plus lorsqu’Aedan lui demanda de tomber la chemise… et qu’il s’executa, fredonnant le vieux tube de Zebda qui mettait Charlie de si bonne humeur. Avoir eu une copine française, finalement, avait eu cet avantage aussi : en plus de connaître des chansons pourries anglophones, il en connaissait encore plein dans la langue de Molière. Pour le plus grand plaisir de ses amis… ou pas. « ouuh… quelles douces mains vous avez là, sieur Aedan ! » ricanant, il s’arrêta net, lorsqu’il vit tout à coup le brun descendre d’un étage, arriver à ses mollet et… les tater. Il ouvrit de grands yeux, pleins de surprise. Avait-il libéré le kraken ? On aurait bien dit. Incapable de rien dire de plus entre ses rires étouffés par les larmes provoquées par ceux-cis : that was at this moment Elliott knew : he fucked up arquant un sourcil, il lança à Aedan, un peu moqueur : « j’suis à peu près certain que tu te souviendras pas de m’avoir taté, demain. Mais carrément ! j’te prends quand tu veux ! » oups. Il réalisa que sa phrase était légèrement -énormément tendancieuse. Si ça n’avait pas été lui qui l’avait dite, il aurait probablement crié « C’EST LE TITRE DE TA SEXTAAAAAPE ! » Mais non. Il s’était contenté de se reprendre, aussi rapidement que possible : « A la course, hein ? À la course ! » Bordel, là, il allait vraiment commencer à se poser des questions sur ses attirances, si ça continuait comme ça !

Il sursauta lorsqu’Aedan lui attrapa le nez, suivant le mouvement : il n’avait aucune idée de ce que son ami tentait d’accomplir, mais ça le faisait clairement marrer, de se faire littéralement mener par le bout du nez : l’expression prenait tout son sens. Soudain, il se redressa, fier, et planta avec force ses poings sur ses hanches : « Ah ! non ! c’est un peu court, jeune homme ! On pouvait dire… Oh ! Dieu ! … bien des choses en somme… En variant le ton, – par exemple, tenez : Agressif : Moi, monsieur, si j’avais un tel nez, Il faudrait sur-le-champ que je me l’amputasse ! » Amical : « Mais il doit tremper dans votre tasse Pour boire, faites-vous fabriquer un hanap ! » Descriptif : « C’est un roc ! … c’est un pic ! … c’est un cap ! Que dis-je, c’est un cap ? … C’est une péninsule ! »

Il ne savait pas vraiment si il comprendrait la référence. Mais lui, il y était ! Il pouvait sans aucun souci se retrouver dans le personnage de Cyrano, le temps de quelques secondes. Et puis, avouons le : cette réplique le faisait bien rire ! Tout à coup plus sérieux, Elliott réalisa qu’il n’avait aucune idée de ce que cette Kim K avait pu faire pour en arriver là. Il haussa les épaules : « j’sais pas… mais je sais qu’elle a un si gros popotin, qu’elle peut y poser des bouteilles de champagne sans que ça tombe ! t’imagines ? En fait, cette fille, c’est un rangement Ikéa vivant ! c’est super pratique !! on devrait tous en avoir une chez soi ! Mais… faudrait qu’elle soit muette. Pas envie de devenir con à son contact, j’me débrouille très bien tout seul ! » riant, il ne comprit pas tout de suite comment il s’était retrouvé sur la piste de danse avec Aedan qui… faisait la danse du poulpe ? À fond, Elliott se contenta de l’imiter. De temps à autres, il enchaînait quelques pas bien ringards, tels que le robot, ou encore : le mime et sa vitre. Ils étaient ridicules. Et le pire dans tout ça, c’était sans doute qu’ils ne remarquaient pas ces gens qui les regardaient plus qu’ils ne dansaient : Elliott aurait très probablement de grosses surprises, le lendemain, en swipant sur les réseaux…