Aedan, I'm your sister | Pv Aedan

Aedan avait commencé sa journée normalement et était à présent penché sur le dossier d’une affaire assez compliquée. Une affaire qui lui avait déjà fait faire plusieurs nuits blanches et qui lui avait fait s’arracher quelques cheveux aussi. Mais c’était aussi une affaire passionnante, le genre d’affaire qu’Aedan aimait. Oui, ça pouvait sembler totalement paradoxal, mais parfois, il ne fallait pas chercher avec lui. Aedan pouvait être un paradoxe à lui tout seul quand il le voulait. Ou même quand il ne le voulait pas. Quoiqu’il en soit, rien n’aurait pu le préparer à ce qu’il allait bientôt vivre. Totalement ignorant de ce qui était en train de se tramer depuis quelques temps déjà, il poussa un énième soupir en relisant quelques parties spécifiques du dossier, le tout en carburant au café. Ah, sans son précieux café, jamais il ne tiendrait. C’était mal d’en abuser, ce n’était surtout pas bon pour son corps sur le long terme, mais il n’y pensait pas. Seul son boulot comptait. Il n’avait pas le droit à l’erreur car il en allait de la vie d’une personne dont l’innocence ne faisait aucun doute à ses yeux. Il devait être prêt à affronter la partie adverse, il devait être prêt à défendre sa cliente et à se montrer convaincant au tribunal. Mais le procès n’avait lieu que dans quelques jours, il avait donc encore un peu de temps pour se préparer. Au moins, il ne semblait avoir aucun mal à se concentrer sur sa tâche, malgré les récents chamboulements dans sa vie, malgré les hauts et les bas. Il avait cette capacité parfois extraordinaire de pouvoir juste faire abstraction des choses et pensées inutiles pour se concentrer à fond sur son travail. Non pas qu’Elvyra – oui, surtout elle – était inutile, loin de là ! Mais penser à elle lui desservirait fortement, là, tout de suite.

Peut-être proposerait-il à Rosylia de se voir dans la soirée, histoire qu’il puisse souffler un peu et se changer les idées. Mais ça, il verrait plus tard. Alors qu’il buvait une énième gorgée de café, il crut entendre des voix provenant de dehors. L’une d’elles appartenait à sa secrétaire, l’autre… une cliente potentielle ? Aedan se prépara déjà à la recevoir, même s’il préférait toujours que les gens viennent sur rendez-vous. Question d’organisation. Mais personne ne vint frapper à sa porte et personne n’entra dans son bureau. Etrange. Il fronça les sourcils, haussa les épaules, puis retourna à son dossier sans plus y penser. Quelques heures plus tard, il avait fini sa journée. Il avait décidé de s’octroyer un peu de repos, ce soir. Car le repos était important aussi et puis, il ne pouvait pas enchaîner les nuits blanches, ce sera totalement contre-productif. Il sortit donc du bâtiment, plutôt de bonne humeur car il avait bien avancé, aujourd’hui. Il ne lui restait plus qu’à rentrer et prendre un bon bain pour se détendre. Souriant à cette perspective, il sortit son paquet de clopes et s’apprêta à en allumer une lorsqu’un bruit attira son attention en le faisant légèrement sursauter. Le bruit d’une poubelle qu’on renversait. Un chat ? C’était assez courant. Jetant un œil vers l’origine du bruit, il ne vit pourtant pas de chat, mais une jeune femme accroupie près de la poubelle renversée, en train de ramasser ce qui en était tombé. C’était louable. La plupart des gens auraient juste passé leur chemin comme si de rien n’était. N’écoutant que son bon cœur, Aedan s’approcha donc d’elle dans le but de l’aider – car elle faisait quand même un peu pitié, là. « Je vais vous… » Il ne termina pas sa phrase car il venait de reconnaître le visage de cette jeune femme. Du coup, il la regarda un instant d’un petit air ahuri avant de se redresser.

Il ne la connaissait pas à proprement parler, mais il l’avait aperçue plus d’une fois, toujours à quelques pas de lui. Au début, il s’était dit qu’il se faisait des idées, qu’il était juste parano, mais finalement, il en était venu à la conclusion qu’elle le suivait. Qu’elle le stalkait, même. Il se souvenait très bien l’avoir vue souvent au tribunal aussi, assistant à presque tous ses procès. A tous les coups, elle était l’une de ces fangirls extrêmes qui avait jeté son dévolu sur lui pour il ne savait quelle raison. Il n’était pas une star, il était juste un avocat qui essayait de bien faire son boulot. Il avait déjà songé à l’interpeller plusieurs fois, alors il était hors de question de laisser passer une telle occasion. « Toi. » Finies les politesses. Elle l’avait rendu parano et puis, elle semblait plus jeune que lui, alors il pouvait bien se permettre de la tutoyer. Pas de respect pour les stalkeurs ! « Qu’est-ce que tu me veux ? Pourquoi tu me suis ? » Était-elle vraiment allée jusqu’à se planquer derrière une poubelle pour l’observer ? Le jeune homme croisa les bras, sourcils froncés. Il n’était clairement pas content. « Et n’essaie pas de faire la maligne. Je t’ai vue. Je t’ai vue à presque tous mes procès. Je t’ai vue me suivre plus d’une fois. Alors crache le morceau si tu ne veux pas que j’aille porter plainte et demander une injonction d’éloignement. » Comment ça, il y allait fort ? Comptait-il vraiment faire ça ? Peut-être qu’il bluffait, mais il était bon à ce jeu-là et puis, peut-être que cette simple menace ferait entendre raison à la jeune femme ? Il l’espérait, du moins.

Cette fois, il allait la confronter. Il allait lui demander ce qu’elle lui voulait, pourquoi elle le suivait tout le temps. Il n’était pas parano au point de juste avoir imaginé toutes les fois où elle était entrée dans son champ de vision. Alors, lorsqu’il l’avait vue près de cette poubelle, il y avait vu une opportunité. Il ne s’était pas montré très avenant, mais il n’en pouvait plus de cette situation. Il voulait mettre les points sur les i et en finir au plus vite. Alors oui, il s’était montré menaçant, même s’il espérait bien ne pas devoir aller plus loin que ça et ne pas devoir réellement entamer une procédure contre la jeune femme. En soi, elle avait l’air totalement inoffensive, mais il fallait se méfier de ce genre de personnes. Qui savait ce qui se cachait derrière ce joli minois ? Bien entendu, elle affirma qu’il se trompait de personne. Aedan fronça les sourcils, bras croisés, ne la lâchant pas du regard. « Non, je ne me trompe pas. J’ai une très bonne vue. » Sérieusement ? C’était quoi cette réplique à deux balles ? Peu importe. C’était la vérité, après tout. Néanmoins, il ne s’était certainement pas attendu à la suite, pas du tout. Voilà que l’inconnue semblait vouloir inverser les rôles, se faisant passer pour la victime et Aedan pour…un stalkeur ou, pire, un pervers. C’était inacceptable. « Tu es sérieuse, là ? » Il la regardait, incrédule, tandis qu’elle poursuivit, le menaçant clairement. Aedan sentit soudain la colère monter en lui et il serra les poings. Il ne devait pas s’énerver. Il devait rester calme comme quand il était au tribunal. Oui, voilà. Il devait traiter cette situation comme un procès. Mouais…ce n’était pas vraiment la même chose et face aux inepties déblatérées par la jeune femme, il avait beaucoup de mal à garder la face.

Pire, elle se mit à interpeller les passants, les qualifiants de témoins. Aedan se mit à souffler, essayant de ne pas exploser, mais plus ça allait et plus ça devenait difficile. Maintenant il savait ce que ressentaient les personnes qu’on accusait à tort et qui se faisaient condamner en prime. Certes,  on ne pouvait pas réellement comparer leurs situations non plus, mais il y avait quand même une similitude, non ? Lorsqu’elle se baissa pour ramasser la poubelle, ce fut la goutte de trop pour Aedan qui se sentait vraiment idiot, qui avait l’impression qu’on se moquait de lui et qu’on prenait un malin plaisir à le faire. « ÇA SUFFIT ! » Eh merde. Il venait de crier en pleine rue et, évidemment, tout le monde se retourna sur lui. Il soupira et fit signe aux gens de continuer leur route. « C’est rien ! » Comme si ça ne suffisait pas, la jeune femme eut le culot de lui proposer d’aller boire un verre. Sérieusement ? A quoi jouait-elle ? A le rendre chèvre ? « Mes…agissements ? Je n’ai absolument rien à me reprocher. Tu dois vraiment être une sacrée mythomane, ma pauvre. » En effet, la pauvre. Car évidemment, il ignorait tout de sa véritable identité et lorsqu’il le saurait, il s’en voudrait probablement de l’avoir traitée ainsi. Néanmoins, ce n’était pas comme si elle ne l’avait pas cherché. « Très bien. Je n’ai aucune envie de me donner en spectacle ici, alors allons au calme. » C’était la seule raison. Car il n’avait pas l’intention de la laisser partir sans explications, sans qu’elle n’ait retiré ce qu’elle avait dit à son sujet. Et si pour ce faire il devait payer une boisson à cette fille, qu’il en soit ainsi.

Il pointa un café non loin de là du doigt, puis attrapa le poignet de l’inconnue assez fort pour qu’elle ne puisse s’en défaire facilement. Hors de question qu’elle profite du court trajet pour se sauver. Il la tenait, il ne la lâcherait pas. Une fois devant l’établissement, il ouvrit la porte et lâcha la jeune femme, l’incitant à entrer devant lui, histoire de s’assurer qu’elle ne s’enfuirait pas. Encore une fois. Puis, ils s’installèrent à une table libre, un peu à l’écart. Parfait. Pas besoin de regarder la carte, il commanda un café direct. Puis, il reporta son attention sur la brune. « Maintenant dis-moi ce que tu me veux. Tu es la présidente de mon fanclub dont j’ignorais l’existence ? Tu me stalkes parce que tu es amoureuse de moi et tu t’es imaginée vivre une magnifique romance avec moi ? Tu en as après mon argent ? Tu cherches à te venger parce que j’ai fait condamner l’un de tes proches ? » Oui, son imagination allait bon train et il pensait sans doute encore à plein d’autres possibilités. Plongeant son regard dans le sien, il était déterminé à la faire parler. « Parle. »