Même si l'enfer nous épargne, on peut tout détruire et sourire ensemble // Maeva

Même si l'enfer nous épargne,
on peut tout détruire et sourire ensemble ;

feat. @Maeva Espinosa ☾

Outfit – Lorsque les deux jeunes filles se retrouvent face à la devanture du magasin, le doute s’empare de l’étudiante ; c’est la première fois qu’elle s’apprête à faire un truc pareil, tout bonnement car contrairement à son amie elle n’a jamais manqué de rien. Elle demande donc à Maeva si elle est sûre de son coup et cette dernière la rassure au détour de quelques mots tout en lui attrapant les mains ; Junon manque de sursauter à ce geste amical assez inattendu mais ça n’est pas forcément pour la déranger. Son interlocutrice rompt ensuite le contact pour lui expliquer plus en détail comment elles vont pouvoir s’y prendre afin de leurrer l’employé de la boutique. L’artiste en herbe écoute attentivement chaque parole de son amie, hochant doucement la tête tout en essayant d’imaginer ce qu’elle pourrait dire au vendeur pour l’occuper assez longtemps.  « Ça va aller. » Termine-t-elle en faisant un clin d'œil à l'étudiante. Cette dernière lui sourit, finalement convaincue par les arguments de l’autre gamine.

Elles s’élancent donc, Maeva étant la première à entrer puis quelques instants après c’est au tour de Junon de faire son apparition lorsque l’employé termine de discuter avec les clients qui le sollicitent. Assez incertaine, elle se dirige directement vers lui, tentant de prendre un minimum d’assurance pour paraître crédible. Elle se racle la gorge et passe une main dans ses cheveux avant de se lancer. « Euh, excusez-moi ? » Le jeune homme, jusqu’ici de dos et occupé à faire un peu de rangement dans les rayons près des caisses, se retourne pour lui faire face. Il ne doit pas être beaucoup plus âgé qu’elle et lui adresse un sourire bienveillant en la saluant. Elle tremble un peu mais tente de paraître le plus naturelle possible ; la jeune fille remarque immédiatement qu’il porte un haut à l’effigie de l’Attaque des Titans, un anime japonais qu’elle affectionne tout particulièrement. « Joli le sweat ! Tu l’as choppé où ? » Demande-t-elle avec enthousiasme ; le pire dans l’histoire étant qu’elle ne se force qu’à peine à s’intéresser à ce sujet. « Oh bah merci, je l’ai eu sur Aliexpress. » Dommage, il est plutôt mignon ; mais un mec qui achète ses fringues sur un site exploitant la jeune ouvrière chinoise, non merci. Elle fait tout de même semblant d’être super emballée et au bout de quelques échanges, ne voyant toujours pas son amie revenir, bifurque sur un tout autre sujet avant qu’il ne retourne à ses occupations. « Sinon, tu pourrais peut-être m’aider. J’ai un projet artistique à faire pour les cours, on doit réaliser une sculpture sur un thème donné, mais le médium et la technique avec lesquels bosser sont libres. Du coup tu pourrais peut-être m’aiguiller en fonction de l’idée que j’ai ? » Il acquiesce et elle commence à lui donner tout un tas de détail inventé sur l’instant ; l’homme tente de lui prodiguer les meilleurs conseils qu’il peut tandis que l’étudiante n’écoute que d’une oreille distraite ses mots, l’esprit bien trop accaparé à observer le moment où Maeva passera la porte pour prendre la fuite également. En plus du peu qu’elle en entend, le vendeur n’a pas l’air hyper calé sur le sujet et elle manque à plusieurs reprises de le reprendre, tant les inepties qui sortent de sa bouche sont parfois grosses.

Finalement son amie refait son apparition, lui adressant un geste furtif et sort de la petite boutique tandis que Junon fait mine de continuer à écouter son interlocuteur. Lorsqu’il termine son charabia, elle lui sourit faussement. « Ah oui c’est carrément plus clair. Bon, je vais y réfléchir et je repasserai dans la semaine, merci beaucoup et bonne journée ! » Puis elle s’éclipse à son tour, rejoignant son homologue quelques mètres plus loin à petite foulée, accueilli par un large sourire. « Et c’est bingo ! » Elle sort les bombones de ses vêtements, une rouge une bleue et une jaune et l’étudiante la regarde faire avec des yeux écarquillés. Ça se voit qu’elle n’en est pas à son coup d’essai ; son amie lui demande ensuite s’il s’agit bien des trois couleurs primaires. « C’est pas tout à fait exact, je t’expliquerai plus en détail s’tu veux ! Mais t’inquiète, on pourra déjà faire plein de trucs avec ces trois couleurs-là déjà ! » Répond-elle avec indulgence, ne souhaitant pas faire la morale à son amie sur les idées reçues et totalement fausses qu’on fait apprendre aux enfants à l’école. L’adrénaline provoquée par la situation lui donne un regain d’énergie et elle est particulièrement enthousiaste lorsque son amie la gratifie d’un compliment tout en l’appelant partenaire. « Mais wow Mae, c’est surtout toi, t’as tellement géré il y a vraiment vu que du feu j’crois ! » Dit-elle d’un ton stupéfait en souriant à son tour. Maeva, très enjouée, lève sa main pour que la jeune fille vienne taper dedans avec la sienne, ce qu’elle fait dans le seconde avant de s’esclaffer de rire.


Il ne leur reste plus qu'à trouver un endroit où laisser leur empreinte artistique comme le souligne très bien son interlocutrice ; le souci principal étant qu’elles sont dans un coin assez fréquenté et qu’en plein jour, elles risquent de se faire rapidement réprimander par quelqu’un ou même par les autorités avec un peu de malchance. Heureusement Junon connaît cette ville presque comme sa poche ; elle vit là depuis toujours après tout. En y réfléchissant bien, un endroit lui vient en tête et pourrait être le lieu idéal pour exprimer leur créativité. « Suis-moi, j’ai une idée. » Elle désencombre son amie pour qu’elle n’ait pas à porter les bombes de couleur à la vue de tous en les plaçant dans son sac-à-dos puic leurs pas les emmènent à quelques rues de là pour se retrouver devant la  St. John’s Church Murals. On peut observer sur les murs de celle-ci de nombreuses peintures murales à la fois colorées et inspirantes, pleine d’espoir dans ce quartier qui a été au cœur des manifestations des Black Lives Matter l’an passé. La jeune fille sourit ; puis avec son amie elles poursuivent leur chemin jusqu’à se retrouver dans une petite ruelle adjacente ; un peu dissimulée et à l'abri des regards indiscrets, c’est l’endroit parfait pour ce qu’elles s’apprêtent à faire. « Tu sais ce que tu voudrais représenter ? De mon côté j’veux absolument dessiner un soleil, une lune et peut-être quelques étoiles, c’est un peu ma marque de fabrique, tu vois. » Elle hausse les épaules et observe longuement le grand pan de mur en briques rouges, encore vierge de toute trace de peinture. Mais ça n’est qu’une question de minutes avant qu’il ne s’habille d’une multitude de couleur.