Agression nocturne - Ft. Elliott

Lorsqu’il ne sortait pas pour boire des coups ou qu’il ne tombait pas de fatigue après des heures bien remplies de répétitions – souvent riches en émotions, il arrivait parfois à Elliott de vouloir rester seul. Cela pouvait surprendre ceux qui le connaissaient bien, tant il aimait faire de nouvelles rencontres, sortir avec ses amis. Depuis la mort de Charlie, rares étaient les moments où il se permettait de rester seul : le silence le terrifiait. Cependant, il lui arrivait de ressentir ce besoin : rester loin du bruit, de la foule, de la folie de la ville qui n’avait de cesse que de courir partout, tout le temps, pour mieux se souvenir.

Il marchait sans but ce soir là. D’abord, il s’était arrêté boire un verre, dans un bar où les vieux faisaient leur tiercé alors que d’autres restaient pendus aux sabots des chevaux qui soulevaient la poussière en nuée autour d’eux tandis qu’ils galopaient à perdre haleine : pas le genre de débit de boisson dans lequel Elliott avait l’habitude de s’arrêter, il se trouvait étrangement réconforté par l’ambiance cosy qui régnait dans l’établissement. Comme hypnotisé par la course, il avait terminé son verre lentement, bercé par les vapeurs d’alcool et la fumée du cigare de l’homme d’âge mûr qui s’était assis à côté de lui, surveillant scrupuleusement le cheval sur lequel il avait tout misé… Le comédien adressa un sourire poli à son voisin de zinc : « Bonne chance ! » avait-il lancé, posant la monnaie à côté de son verre vide.

Sitôt à l’extérieur, il se heurta au froid qui lui transperçait les os. Il remonta son col et enfouit ses mains dans ses poches, rêveur. L’air absent, ses paupières se faisaient lourdes mais il n’avait pas sommeil. Pas encore : il avait besoin de marcher, de comprendre. Il repensait à ces quelques dernières semaines de folie – ses retrouvailles avec Rosy et l’anniversaire du départ de Charlie : cela faisait maintenant six ans qu’elle était partie. Depuis, Elliott s’était juré de ne plus jamais s’attacher. Ne plus aimer pour ne plus souffrir, c’était encore la solution qu’il avait trouvé : radicale, elle n’en restait pas moins efficace. A mesure de ses pas rythmés qui claquaient sur le macadam humide, Elliott se souvenait. Là, le glacier préféré de la blonde. Il se souvenait encore de cette après-midi qu’ils avaient passé à dévorer des coupes à en avoir, le lendemain, une belle crise de foie. Ici, le cinéma où ils avaient échangé leur premier baiser. Il ne se souvenait plus vraiment du film qu’ils avaient prévu de voir – seulement cette sensation de bien-être et d’amour infini. Le sentiment d’avoir enfin trouvé sa place ; la pièce manquante au puzzle de la vie de l’adulescent qui, comme beaucoup à cet âge ingrat galérait dans sa vie, à l’époque… Douloureux, ces souvenirs faisaient pourtant du bien à Elliott qui sentait son coeur doucement se gonfler d’une agréable nostalgie. Bien vite, il prit le parti de couper par le parc : dernier spot incontournable de son pèlerinage improvisé. Ce banc où tous les jours après les cours, Elliott rejoignait la blondinette, lui assurant que tout irait bien : il serait médecin avant que le cancer ne l’emporte. Caressant le bois d’une main tremblante, la mâchoire crispée, il chassa une larme traitresse. Peut-être, pensa-t-il, était-il temps de rentrer à trop vouloir se souvenir, Elliott avait finalement provoqué ce qu’il redoutait : Le coup de blues qui l’incitait à retourner sur ses pas.

Sans un mot, il rebroussait chemin lorsqu’il vit une silhouette se détacher au milieu de la pelouse. Longue, inerte. Probablement un tronc d’arbre ? À moins que ce ne soit un corps ?! Par acquis de conscience, Elliott se précipita vers cette silhouette qu’il reconnut en s’approchant :

« No… »

Il n’eut pas le temps de terminer son exclamation, qu’il fut pris d’une douleur violente dans les yeux qu’il ferma aussitôt, ses mains se portant instinctivement à ceux-cis.

« Ah putain ! Nora, c’est moi ! Elliott !  La vache ! » gémissant, il s’essuyait les yeux comme il pouvait, « T’as des mouchoirs ? Du sérum phy ? Quelque chose ?? Ça fait super mal ton truc !! sérieux ! »

Elliott avait les yeux en feu. En même temps, il venait de se prendre une quantité certaine de spray au poivre dans la figure et comprenait d’ailleurs très bien la douleur des cuisiniers débutants qui se frottaient le visage après l’utilisation du condiment. Erreur de débutant. Erreur aussi débutante d’ailleurs, de ne pas avoir de sérum physiologique sur lui. Elliott le savait pourtant : après tout, il n’était pas resté en reste, durant ses années de fac, lors des manifestations. Pas qu’il ait été du genre révolté, en réalité, il était surtout rêveur. Mais lorsqu’il voyait ses amis se regrouper pour leurs convictions, il se sentait pousser des ailes : sentiment d’appartenance. On marche ensemble. On revendique ensemble . On pleure ensemble ; pas que de tristesse. Alors bien évidemment, avec le temps, Elliott avait compris le truc. Cependant… les années étaient passées et ses habitudes d’étudiant, il y avait belle lurette qu’il les avait perdues. Pourtant, elles n’étaient visiblement pas toutes à jeter.

Tapotant son visage avec les manches de son sweat, il rit légèrement à la remarque de Nora :

- Tu veux vraiment qu’on aille aux urgences pour ça ? Il lui adressa un clin d’oeil larmoyant avant de conclure en haussant les épaules : ne t’en fais pas. Tu n’as pas encore réussi à me tuer, vas ! Riant de nouveau, il pencha son visage en avant, tentant de se débarrasser tant qu’il pouvait de la sensation de brûlure. Il fronça les sourcils, regardant autour d’eux. Dans le flou, il repéra la mare, à quelques mètres d’eux :

- Je sais ! La mare ! Ça fera le taff !

Il se dirigea vers l’étendue d’eau, et s’accroupit face à celle-ci, y plongeant les mains pour éponger son visage. Le froid estompait la douleur et il lui expliqua, comme pour se justifier :

- En même temps...j’ai du te faire flipper, à arriver comme ça. Mais… faut dire que c’est pas courant, de tomber sur des gens allongés dans l’herbe à cette heure-ci. Il haussa les épaules avant de préciser : tomber sur des gens tout court, d’ailleurs. J’ai cru qu’t’avais fait un malaise : il fait froid, tu bougeais pas…

Réalisant l’absurdité de la situation, il se mit à rire : -bordel ! celle là, elle aurait sa place dans une de ces comédies du samedi soir !
Soupirant, continuant de laver son visage à grandes eaux, il marqua une pause, avant de s’asseoir dans l’herbe :

- J’crois que pour le moment...j’peux rien faire d’autre que d’attendre. Alors, dis moi plutôt : qu’est ce que tu deviens, depuis le temps ? j’ai raté beaucoup de choses ?

Habitué à la brûlure lancinante et passé la surprise, Elliott se mit à rire, secouant la tête « ne t’excuse pas. Y’a tellement de mecs louches dans les rues la nuit… j’aurais pas fait le fier non plus à ta place. T’as eu la bonne réaction. Du moins… pour sauver ta peau ! Tu s’rais vachement forte, en cas d’apocalypse zombie ! » il tenta un clin d’oeil, mais bien qu’y ayant mis tout son coeur, rien ne se passa, ses paupières encore endolories par l’irritation due au produit. « oh. Au fait : j’espère que t’as pas acheté ton truc sur Wish ou Aliexpress : j’ai pas franchement envie d’avoir les yeux qui fassent des bulles, quand j’me réveillerai demain ! » ricanant, il avait ensuite fini par lui expliquer la raison de son approche pas franchement subtile, hochant la tête à la réponse de Nora. Après tout, être seule la nuit dans un parc… c’était bien ainsi, que la majeure partie des meurtres étaient perpétrés, dans les experts et autres Castle ! Lui adressant un sourire, il fouilla dans sa poche « personnellement, je ne sors jamais sans mon nunchak’ ! » et moqueur, il tendit la main pour lui montrer le porte-clefs accroché à celles-ci : babiole de paquet de céréales, délire de type éméché, plus très frais, arrosant ses céréales à cinq heures du mat d’une rasade de whisky.
Souriant, il s’allongea dans l’herbe, passant ses mains sous sa tête, observant à son tour les astres : « J’comprends c’que tu veux dire. Le ciel est vachement beau ! Enfin… on y verrait mieux sans cette brume, mais... » à vrai dire, il n’était pas vraiment certain pour la brume : il y voyait flou, aussi cette hypothèse n’était que spéculation. Pour le reste, c’était vrai : du peu qu’il y voyait, Elliott trouvait le ciel magnifique. En même temps, comment cela aurait-il pu en être autrement, pour celui qui passait le plus clair de son temps la tête dans les nuages ? Hochant la tête, il sourit, avant de tourner la tête vers Nora « c’est un peu compliqué. Pour mon père, j’suis médecin. Pour les autres… j’suis… sur les planches, tous les soirs ou presque. Et force est de constater que des gens m’arrêtent dans la rue pour prendre des selfies, maintenant. » riant légèrement, ces situation lui semblant tellement irréalistes et encore si nouvelles, il ne parvenait pas à y croire : « enfin … C’est chelou. J’veux dire, demain matin, t’irais, toi, prendre un selfie avec ton boulanger ? » riant légèrement, il se redressa : « merci Nora. Ca m’touche tu sais ? » si certains auraient pu dire ces mots sans une once d’honnêteté, Elliott, lui, était sincère : toujours reconnaissant des mots agréables ou plus difficiles à entendre que ses amis pouvaient lui adresser : ils étaient les seuls de qui l’avis comptait vraiment pour lui, et Nora n’y faisait pas exception. Silencieux, il écouta son amie lui donner quelques nouvelles : session de rattrapage de ces quatre années où ils s’étaient perdus de vue. « Mais alors… tu as aussi un taff chez un véto ici ? » Sourire malicieux, il avait à son tour répondu à la question que la jeune femme lui retournait « eh bien… comme je te l’ai dit tout à l’heure, j’ai laissé tomber médecine. Je suis revenu à mes premières amoures : le théâtre et ça me réussit plutôt bien. Perso… j’ai pas l’impression que quoique ce soit ait changé : j’aime toujours autant sortir et faire le con, mais askip… j’ai comme qui dirait une réputation à tenir, maintenant. Enfin, c’est Roman qui le dit. D’ailleurs… J’crois que tu l’avais déjà croisé non ? c’est mon meilleur pote. Et… maintenant, mon manager, aussi ! » haussant les épaules, il poursuivit : « mais… j’crois qu’ça lui monte à la tête tout ça, bien plus qu’à moi, en tous cas ! » riant de plus belle, il attrapa son paquet de cigarettes dont il en préleva une. Et l’allumant, il reprit « hm ! Et j’ai un chat maintenant ! Shakespeare ! Oui, ok. Pas très original, pour un comédien, tu m’diras. J’te le présenterai, si tu veux ! Bon, pas certain qu’il te considère comme sa meilleure pote pour les vaccins, mais… il est cool comme chat ! » et souriant, il conclut : « tu sais tout. Pas grand-chose a bougé, par ici, depuis ton départ, tu sais ? »

Rassuré par l’affirmation de son amie, Elliott soupira, presque satisfait. Il pourrait bien rester aveugle pour la soirée, il n’en avait pas grand-chose à faire : il n’aurait pas de mutation cheloue due aux produits douteux utilisés dans la composition du produit. Il rit légèrement. Pas qu’il n’ait plus mal, en réalité, c’était même globalement le contraire, mais il pouvait deviner ce qui se passait devant lui, et c’était déjà pas si mal, si on y pensait quelques instants. Hochant la tête, il sourit « cool. J’prends totalement ça pour une bonne nouvelle ! En fait… j’crois qu’c’est la seconde après… ben après ton retour, que tu viens de m’apprendre ! » il sourit, écoutant les questions de son amie. Haussant les épaules, il répondit pas vraiment certain de lui : « à c’qui paraît. Mais promis. J’ai pas changé. J’ai gardé Eli près de moi pour rester un p’tit con, il m’remet les pieds sur Terre quand j’commence à me prendre pour la sœur cachée des Kardashian ! » il se mit à rire légèrement. Bien évidemment, sur le fond, il était on ne pouvait plus sérieux. En même temps, fallait dire que ça lui était tombé dessus là, comme ça, d’un coup. Alors forcément, pour s’y faire, il avait du apprendre à composer avec ce qu’il avait. Changer, c’en était hors de question. Et pour ça, il s’était bien décidé à garder les mêmes habitudes, les mêmes sorties avec les mêmes potes, dans les mêmes boites, les mêmes frasques qui n’auraient probablement eu aucune répercussion, s’il était resté le Collins discret qu’il avait toujours été. Problème ? Maintenant, il devait faire attention. Et il n’y parvenait pas : sa vie, il l’aimait bien trop avec ces amusement de type irresponsable, ado dans un corps d’adulte. Impossible pour lui de se passer de ses petits jeux avec son frère ou ses potes.

Fronçant les sourcils, il hésita un instant « j’sais pas. Bon, dire qu’il s’en tape, p’t-être pas, mais pour le coup, il m’a jamais dit quoique ce soit là dessus. S’il est jaloux… c’est vachement bien caché ! » avait-il admis en souriant de bon coeur, avant d’enchainer sur son fils. Enfin, si on pouvait dire ça ainsi. Cependant, il fallait bien admettre qu’à écouter Elliott parler de Shakespeare, son chat noir et blanc gracieux et câlin, on aurait sans doute pu se tromper. Et à le voir agir avec lui, c’était encore pire. Un véritable daron. A croire qu’Elliott ne s’était pas encore aperçu que l’animal n’était pas l’un de ses pairs. Ou peut-être bien qu’en réalité, ça lui était bien égal. Son chat avait toujours été là pour lui. Dans les moments de joie, de jeux, de calme, mais aussi lorsque la tempête venait terrasser le comédien et mettre sa santé mentale dans tous ses états. Présent au décès de la petite amie du jeune homme, celui-ci s’était occupé de l’animal pour oublier sa douleur. Donner un peu d’amour à un être vivant alors qu’il en manquait cruellement, quelque part, ça lui avait fait énormément de bien. Relevant le regard vers elle, il constata avec satisfaction que ses yeux commençaient à désenfler : «  J’en doute pas. Tiens, voilà mon adresse. Passe, si tu veux ! Si tu lui fais des gratouilles, tu t’en feras un bon pote ! » il se mit à rire. Son chat était trop facilement soudoyable. Il imaginait d’ailleurs la facilité déconcertante que des voleurs auraient, si un jour la folle idée leur venait de le séparer de son pépère. « et puis. Ca nous donnerait une opportunité de boire un café, si ça t’tente ! » il lui donna donc l’adresse et hocha la tête, avant d’avouer, des plus sincères «  je suis tellement content de te voir moi aussi… t’as pas idée… » il fit l’état des lieux des onze dernières années, se demandant ce qu’il pourrait lui apprendre de nouveau. Avait-elle su pour Charlie ? Avec le recul, il n’était pas même certain qu’elles se soient connues. Inutile de remuer des couteaux dans des plaies toujours ouvertes. « T’es pas trop paumée ? » avait-il demandé inquiet : reprendre ses habitudes après tant de temps, il imaginait combien ça pouvait être compliqué : « si tu veux, on pourra faire des balades ou des sorties, pour te remettre dans le bain ! » avait-il proposé, un sourire bienveillant adressé à la demoiselle…

Elliott était heureux de revoir son amie. Enfin, quand on parlait de « la voir », c’était un bien grand mot… Mais vous avez compris !
La douleur s’estompant, il avait donné son adresse à Nora, hochant la tête, dans un sourire amusé : « j’espère bien, que tu ne viendrais pas que pour lui ! » et riant, il ajouta « promis, j’serai là. Pour le moment,j’suis d’ailleurs jamais très loin alors… tu peux passer quand tu veux ! » il rit légèrement, avant de lui adresser un clin d’oeil lorsqu’elle acquiesça à la proposition du comédien.

Fronçant les sourcils, écoutant Nora. Depuis qu’il était arrivé à Washington, il n’avait que très rarement quitté la ville, et jamais très longtemps. En réalité, c’était même impossible, pour lui. A New-York, il y avait Broadway. Les feux de la rampe l’avaient d’ailleurs attiré plus d’une fois, raison pour laquelle il était parti de longs mois, passer castings et auditions. Mais son coeur et ses pensées étaient toujours ici. Bien évidemment, quitter son ami Jin lui avait fait un pincement au coeur, lorsqu’il était rentré. Mais finalement, il ne regrettait pas : ils s’étaient promis que ça ne serait qu’un au revoir, et ils n’avaient pas cru si bien dire ! Grimaçant, Elliott adressa un léger sourire compatissant à Nora :

« Je comprends. J’ai beaucoup aimé New-York lorsque j’y ai vécu. C’étaient que quelques mois mais malgré tout… je n’ai jamais été aussi heureux qu’en reposant mes valises ici ! » avait-il avoué dans un sourire, avant d’hocher la tête « oui, mais moi… c’est pas pareil ! Dans certains cas, y’en a même qui diraient que je suis maso ! » avait-il lancé en ricanant, moqueur. Parce qu’il aimait des choses que d’autres n’aimaient pas. Ou du moins, il était plus patient, chose presque incompréhensible lorsqu’on voyait le majeur trait de caractère de la famille : tout vouloir tout de suite. Élevé en impatient, d’ailleurs, souvent peu patient et trépignant, il n’y avait vraiment que cette explication qui aurait pu valoir le coup : le masochisme. Haussant les épaules, il avait ensuite proposé dans un sourire : « ben… si jamais ça t’intéresse, y’a une expo, que j’aurais aimé voir, au musée ! Ça pourrait-être cool qu’est ce que tu en dis ? » et dans un sourire amusé, il posa sa main sur son coeur, et poussa un grand soupir : « ouf. Me voila rassuré ! » avait-il lancé en riant, tamponnant ses yeux qui semblaient s’arrêter de pleurer.

Si vous lui aviez dit revoir Nora dans de telles circonstances, Elliott vous aurait probablement rétorqué que vous étiez malades. Mais il était heureux de revoir cette bouille si familière. Des tonnes de souvenirs lui revenaient en tête. Des tonnes de questions, aussi. Mais plutôt que de la noyer sous celles-ci, il avait opté pour le silence, préférant la tranquillité de cette discussion. Pour un premier contact, c’était très bien ainsi. Pour autant, hors de question pour lui de ne pas la revoir ; son amie lui avait manqué, et c’était tout naturellement qu’il lui proposait de venir avec lui au musée, si le coeur lui en disait. Réfléchissant un court instant, il lui expliqua : « super alors ! Tu me diras quand tu seras dispo ? En ce qui me concerne… je ne fais pas grand-chose de mes journées, mis à part mes répétitions... » et souriant, il poursuivit « je crois qu’elle a commencé la semaine dernière, elle est en place pour un mois, si j’ai bien vu ! » et hochant la tête, il se releva lorsque la jeune femme lui expliqua qu’il serait plus sage pour elle d’aller se coucher. « Oh la vache… ça va aller ? Tu vas pas être trop fatiguée ? » il se mit à rire. Il se doutait que ça irait, de toutes façons, ce n’était pas comme si elle allait avoir le choix ! Il se rappelait ces nuits blanches passées en soirée enchaînées directement sur son gagne pain du moment, lorsqu’il était plus jeune. Moment difficile à passer, drôle, quand il y repensait. Fallait dire que les choses n’avaient pas énormément changé, lorsqu’on y repensait.

Tendant la main à Nora pour l’aider à se relever, il sourit légèrement « Bien sûr, que je vais te raccompagner, ça me fait plaisir ! » en fait, c’était encore mieux que ça, ça le rassurerait. Il n’aimait pas l’idée de voir ses amies traîner seules le soir. En soi, tout le monde faisait ce qu’il voulait de sa vie, mais il y avait tellement de détraqués en ce bas monde, que de la raccompagner le rassurait : vous savez ce qu’on dit : Prudence est mère de Sureté. Et si Elliott n’appliquait jamais ce vieux dicton à ses propres agissements, il était intraitable avec ses proches. Lui adressant un sourire, il se mit en route, mains dans les poches. Sur le chemin, la discussion se continuait, et Elliott n’avait pas vraiment envie qu’elle se termine. Mais vous savez ce que l’on dit : toutes les bonnes choses ont une fin. Et pour être sûr de pouvoir revoir Nora, il avait proposé un échange de numéros : ben quoi, fallait bien aller la voir, cette expo, cette proposition était des plus sérieuses !